Sommaire Mémoire
Introduction
Mon rapport à la crise écologique et économique
Un constat : l'épuisement des ressources dans les pratiques éditoriales
Surproduction & Raréfaction
Surconsommation
L’activité du design graphique et son impact sur le réchauffement climatique
La fabrication de papier et sa filière
Le recyclage des supports et matériaux d'impression et ses limites
La gestion des déchets dans l'industrie de l'imprimerie et l'évolution des technologies de l'imprimé
Le choix du papier et sa certification
Prépresse, traitement des fichiers
La production de livres à grande échelle, le problème du pilon
Industrialisation & Délocalisation
L'impact carbone du numérique
Le designer en tant que messager
Obsolescence vs. Résilience
Un autre modèle économique pour la sauvegarde de nos matériaux ?
Transition d'un modèle économique non renouvelable
Face à l'augmentation des coûts et à l'inflation, des structures éditoriales s'organisent autrement
Tendre vers une économie circulaire
Une posture de métamorphose
Contre-culture, se décloisonner de nos paradigmes habituels
L'esprit hacker
Le mouvement maker
Do It Yourself (DIY)
La récupération
Les outils Open-source
Un écosystème alternatif où co-habiteraient le numérique et le papier
Alternatives qui repensent les formes éditoriales
Des designers qui innovent
Un design libéré de toutes contraintes
Lexique
Bibliographie

Comment évoluent les pratiques éditoriales à l'ère du numérique et quelles sont nos ressources en tant que designers pour créer autrement dans un contexte de crise écologique et économique ? Une exploration des formes éditoriales actuelles — imprimées et numériques — et l'analyse de leur impact écologique respectif, est à la base de ce mémoire. Comment cohabitent ces deux modes de publication au sein du marché de l'édition et quelles sont les solutions pour diminuer leur empreinte carbone, réduire l'extraction des ressources et ne pas participer aux coûts humains liés à la globalisation ? Nous verrons comment plusieurs designers graphiques ont repensé les processus de production et les modes de diffusion en transformant, entre autres, ce qui est déjà produit en de nouveaux usages et formes graphiques, ou en se réappropriant des moyens de production locaux et à plus petite échelle.

Lors de mes années d'études en graphisme, j'ai du assumer plusieurs dépenses : deux ordinateurs, des licences annuelles pour les logiciels propriétaires (qui sont de plus en plus coûteux), des achats de matériel de dessin, peinture et papier. Des outils de travail hardware et software ainsi que le coût des services d'impression et du papier dont le prix ne cesse d’augmenter. J'aurais pu en partie diminuer ces coûts si j'avais eu connaissance de diverses astuces pour imprimer ou entretenir - et choisir autrement - mon matériel pour qu'il dure plus longtemps. Des économies que j'aurais volontiers réalisées en tant qu'étudiante. En outre, si j'avais été sensibilisée plus tôt au design éthique et conscient, à d'autres savoir-faire et aux outils libres, j'aurais probablement moins gaspillé d'argent et participé à une forme d'apprentissage plus durable de mon métier. Comment repenser les formats de communication numérique et papier et leur diffusion qui puisse s'intégrer dans une économie circulaire ? Le passage au numérique n'est pas une solution face à l’épuisement des ressources naturelles donc comment le rendre plus sobre ?

Surproduction & Raréfaction

La production d'objets graphiques, qu'ils soient imprimés ou diffusés sur écran, consomme beaucoup de ressources naturelles. Les ressources qui permettent de créer le papier sont : l'eau, le bois et l'électricité et celles utilisées pour la construction d'appareils numériques : les minerais. Lors de l'utilisation de ces ressources on participe également au réchauffement climatique par la déforestation, la consommation d'eau, le rejet de CO2 et l'extraction des minerais dans le sol. À l'heure de la crise économique et écologique, il est indéniable que l'extractivisme n'épargne pas les pratiques éditoriales. Le monde de l'édition numérique ou imprimée, participe à l'extraction de quantités immesurables de ressources naturelles. La production de papier participe à la déforestation ainsi qu'au réchauffement climatique qui est également alimenté par la consommation énergétique des serveurs et de contenu éditorial. La surproduction de contenu et la diffusion massive de l'information.

En économie il y a une phrase simple qui définit ce mode d'exploitation des ressources : "resources are scarce and wants are infinite ". [1] Cette citation rappelle que les ressources sont rares et les besoins infinis voir illimités. Dans ce concept expliqué dans l'ouvrage Scarcity du même auteur, la rareté y est abordée comme " l'un des faits les plus fondamentaux de la vie : nous vivons dans un monde de ressources limitées qui nécessite des choix quant à la manière dont elles sont allouées". Ces "choses" rares, sont celles pour lesquelles la demande dépasse l'offre. Nous voulons toujours plus par la surexploitation mais cette surconsommation épuise les ressources et les rend rares. Cette raréfaction fait augmenter les prix et finalement, la demande des consommateurs s'oriente vers des produits délocalisés qui ne sont pas aux normes éthiques et écologiques mais rapidement produits et peu onéreux. Par cette "tendance délocalisée" la croissance et la surproduction n'ont pas de limite et menant à toujours plus de profit. Les produits fabriqués dans une chaine non-durable et non-respecteuse de l’environnement répondent à cette demande de croissance, non régulée dans un contexte de mondialisation ultra-libérale. Ces moyens rapides et très peu chers, n'épargnent pas les pratiques éditoriales qui participent à cette course à la production et à ses conséquences tant écologiques qu'humaines.

Comment réduire la consommation des ressources naturelles à l'échelle de notre métier de designer ? Premièrement, on voit apparaître le low-design/low-tech tant dans la diffusion papier qu'à l'écran. Ce terme signifie : "basses technologies" ou technologies douces. C'est dans les années 1970 qu'il est apparu suite aux problèmes écologiques liés à l'essor des technologies informatiques et leur utilisation des énergies fossiles, des métaux, etc. Le Lowtech c'est surtout des " solutions simples et peu coûteuses qui offrent une autre possibilité par rapport aux high-tech qui nécessitent des matériaux polluants et rares". [2] Un besoin de réparation et de transformation technique pour l'exigence d'une : "durabilité forte, une résilience collective et transformation culturelle". D'après une infographie "Low-tech : Assurer durablement l'essentiel pour tous" (Avril 2022)[3] notons les critères de toute démarche d'innovation low-tech qui s'allie à la résilience : "Sobriété, Efficience, Pérennité, Maintenabilité, Accessibilité, Autonomisation, Empouvoirement, Reliance et Simplification". La Low-tech-nation [4] définit également que "la démarche low-tech implique un questionnement du besoin visant à ne garder que l’essentiel, la réduction de la complexité technologique, l’entretien de ce qui existe plutôt que son remplacement."

[1] Kurt Bills- Scarcity
[2] Wikipédia - Lowtech
[3] Low-tech : Assurer durablement l'essentiel pour tous (Avril 2022)
[4] Low-tech-nation

Surconsommation

Chaque année, la consommation de papier croît malgrè la dématérialisation de l'information. L'avènement du numérique ne diminue pas nos consommations de ressources naturelles mais l'alimente. Le support papier résiste à la diffusion écran et devient même plus accessible. Imprimer chez soi à partir de son ordinateur n'a jamais été aussi simple.

En écoles primaires et secondaires bruxelloises, la consommation de papier annuelle est de 1250 tonnes soit 250 millions de feuilles A4 d'après Bruxelles environnement [5] en 2011. Leur étude pour sensibiliser le public à cette question s'appuie entre autres sur des arguments écologiques et économiques : "Seulement 5 % de ce papier est utilisé recto verso. En dehors de la consommation, seulement un tiers du papier recyclable est trié dans les écoles. En outre, 15% du contenu du sac jaune n’est pas adéquat pour le recyclage. Et à peine 29% des écoles utilisent régulièrement du papier recyclé. (Chiffres de deux études de RDC Environment [6] datant de 2004 et 2008.) {...} Mais il y a aussi des arguments économiques. Si l’on prend en compte la consommation inutile de papier, d’encre, d’énergie, l’amortissement des imprimantes, l’archivage et le temps passé à rechercher des documents, on peut réaliser un bénéfice de 0,10 € par feuille de papier imprimée. Economiser 5000 feuilles de papier par an et par personne revient à 25 kg de papier et … à une économie de 250 euros. Et enfin, les arguments écologiques : 500 feuilles imprimées = 7,25 kg CO2 = consommation d’un ordinateur en veille pendant 27 jours = 42 km en voiture. {...} Chaque kilo de papier que vous ne consommez pas réduit vos émissions de CO2 de 2,9 kg."

De plus, EcoConso [7], une asbl namuroise qui encourage les consommateurs à faire des choix et avoir des comportements respectueux de l’environnement a également fait une étude et un focus sur le papier qui révèle des chiffres importants et une croissance de la production éditoriale imprimée malgré le contexte actuel du numérique où la lecture se fait de plus en plus sur écran. Selon Planetoscope [8], une plateforme qui permet de mesurer à la seconde les ordres de grandeurs essentiels du développement durable et de l'écologie : 339 millions de tonnes de papier sont consommés dans le monde chaque année, soit 10750 kilos par seconde. La consommation globale de papier est de l’ordre de 190kg/an/habitant en Europe et de plus de 250 kg/an/habitant en Belgique. Cela comprend le papier sous diverses formes : journaux, magazines, imprimés divers, emballages, cahiers, etc. Le chiffre élevé de la consommation belge peut s’expliquer par un secteur tertiaire très développé. En effet, les activités de bureau sont très consommatrices de papier et l’avènement du numérique n’a pas inversé la tendance, bien au contraire. Selon l’ADEME [9] (une agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) les activités de bureau consomment en moyenne 70 à 85 kg de papier/an/employé. Globalement, cette consommation de papier augmente de 4% /an au niveau mondial".

L'article Le papier : premier déchet du bureau par Agir pour la transition [10] nous le confirme : "Chaque salarié consomme l’équivalent de 3 ramettes de papier par mois. Sachant que 25 % des documents sont jetés 5 minutes après leur impression, on peut facilement faire moins."

[5] Bruxelles environnement
[6] RDC Environment
[7] EcoConso (Avril 2022)
[8] Planetoscope
[9] l’ADEME
[10] Le papier : premier déchet du bureau — Agir pour la transition

Tout ce que l'on créé ou imprime en tant que designer est rarement diffusé durant une longue durée. Dès lors, que faire lorsque ce que l’on créé finit en déchets ? Quelle est la durée de vie d'un projet s'il ne participe pas ou en partie au cycle du renouvelable ou du recyclage ? Nous connaissons l'impact de la consommation de papier sur l'environnement et celui du numérique qui est très énergivore mais comment les rendre plus sobres? De fait, diffuser par le papier permet l'utilisation de matières renouvelables qui sont davantage recyclables. Mais le format livre est-il exemplaire dans sa production et son réemploi ? Les papiers sont-ils tous issus de forêts certifiées durables ? Comment sauvegarder ces matières premières aujourd’hui en pensant au delà du recyclage ?

La fabrication de papier et sa filière

La filière du livre demande beaucoup d’intervenants. De la forêt à la feuille comment est-il devenu un marché mondialisé ? D'après un article de WWF - Papier et pâte à papier [11], elle s’approvisionne «autour des grandes régions forestières comme la Russie, l’Amérique du Nord, l’Europe, l’Amérique du Sud, l’Afrique et l’Asie du Sud-Est.» En 2018 «près de 4 milliards de m3 de bois ont été récoltés pour satisfaire nos besoins mondiaux. Si le bois est un matériau écologique dont l’utilisation permet, entre autre, de prolonger le cycle de vie, sa production, elle, n’est pas forcément durable.» L’exploitation des forêts, qui souvent est irresponsable, a des conséquences environnementales comme la réduction de la biodiversité, l’érosion, la pollution de l’eau et surtout la déforestation.
En 2010, également selon WWF, 23 % des produits forestiers importés en Europe sont présumés d’origine illégale et portent de lourds dommages sur «des forêts à très forte valeur comme l’Amazonie, les forêts du Congo ou encore les forêts boréales. Les populations qui habitent ces forêts peuvent être victimes de la violation de leurs droits et de leurs terres. Ces bois illégaux créent une concurrence déloyale en baissant les prix internationaux. D’après Interpol, le marché mondial du bois illégal représente 51 à 152 milliards de dollars». Même si l’exploitation illégale diminue grandement « la demande reste particulièrement élevée dans les nations les plus riches au monde : les Etats-Unis, le Japon, le Royaume-Uni, la France, les Pays-Bas, et la Chine qui est de loin la plus grande consommatrice. » Malgré les problèmes de légalité, il existe des certifications pour garantir la gestion responsable des forêts. Notons que la certification Forest Stewardship Council (FSC) [12] dans la réglementation et conservation du bois, entretient une forte valeur environnementale dans le marché du bois qui est trop souvent influencée par les coûts du marché mondial. Le FSC recommande des usages primordiaux comme le bois de construction, puis le recyclage et enfin la transformation du bois en charbon ou son utilisation comme énergie.

Pour mieux comprendre la fabrication de papier, remontons au début de la filière : la forêt. Le bois pour papier produit en forêt est fragile à transporter. La pâte à papier en revanche est une ressource mondialisée, au même titre que le blé, le maïs ou le soja, et est facilement exportable car elle aura déjà subit des transformations hors Europe.

Pour la fabrication d’une feuille de papier, il faut du bois et en tirer ses fibres végétales appelées « cellulose ». Les principales étapes sont la séparation des fibres et autres composants du bois en le broyant puis en le cuisant avec de l’eau et autres produits chimiques. Se forme ensuite une pâte qui subit encore quelques transformations pour la rendre plus blanche et solide. Cette pâte gorgée d’eau est finalement pressée et roulée sur de gros cylindres pour qu’elle sèche. Ce processus peut aussi se faire avec du carton et du vieux papier à recycler, cependant, les fibres s'abîment donc ce recyclage n’est pas infini. Les fibres s'utilisent au maximum 7 fois. En plus de ne pas être recyclable à l’infini, sa transformation en usine demande beaucoup de bois, d'électricité et d'eau. Pour produire une tonne de papier neuf il faut 2 à 3 tonnes de bois, 5000 kWh d’électricité et 500 000L d’eau, ce qui coûte beaucoup de ressources naturelles, sachant que la France (l'un des plus grand consommateur de papier) a consommé plus de 8,8 millions de tonnes de papiers et cartons en 2016 [13] sous la forme de papiers de bureau, livres et documents publicitaires, ou encore de papiers hygiéniques et d’emballages. De nos jours, le papier est omniprésent et est le support issu de sources renouvelables par excellence mais seulement si sa fabrication est gérée durablement, ce qui est compliqué à vérifier pour un marché si mondialisé.

[11] WWF - Papier et Pâte à papier
[12] Forest Stewardship Council (FSC)
[13] D’après Copacel dans l'article Ecoconso

(La consommation de bois, eau et électricité pour la production de papier neuf, recyclé et récupéré d'après Odd Paper [14])

Sur le plan de la fabrication du papier, même en oubliant le bois coupé intensivement dans les forêts, notons deux éléments polluants dans la chaine de production du papier qu'il est important d'aborder lorsque celui-ci est délocalisé. Les énergies fossiles pour le transport et les produits chimiques de transformation du bois en papier qui ne sont pas réglementaires dans plusieurs parties de l'EU et surtout hors-EU. Ces produits chimiques non-traités sont trop agressifs et polluants et finissent par se déverser dans nos eaux. Pour rendre ces deux faits d'autant plus crédibles et liés à la délocalisation voici une brève explication de pourquoi l'Europe importe beaucoup le papier : le bois coupé est difficilement transportable, donc les usines qui le traitent et le transforment sont proches des grandes forêts et monocultures (zone d’exploitation). Des forêts situées dans nos pays voisins et non en Europe… De plus, nous importons car la demande et la consommation en Europe est bien plus grande que la production. Un papier dit "fabriqué en France" par exemple ne demande pas de pâte à papier produite en France, en général la pâte à papier est produite hors Europe, puis est transformée en papier en France. «Un produit “Fabriqué en France” ne garantit donc pas forcément que la pâte à papier soit française.» [15]

EcoConso [16] : écrit que "40 % du bois exploité dans le monde produit du papier, dont 17% issu de forêts vierges." Et que cette production, certes, renouvelable engendre des pollutions non négligeables dont du CO2, des composés souffrés, de l'azote, du phosphore, des composés organo-chlorés persistants qui proviennent de la transformation du bois et du blanchiment du papier ainsi que des écoulements d'eau usées provenant des usines papetières dans les cours d'eau. En Europe, d'importants efforts sont fournis pour diminuer ces polluants. Il existe des critères pour choisir du papier écologique et pour recycler, mais cela ne se fait pas sans l'utilisateur·ice qui doit être bien informé de l'impact de ses choix et usages.

[14] Odd Paper, : une jeune entreprise Bruxelloise qui prône la récupération de papier et confectionne des carnets.
[15] WWF - Papier et pâte à papier
[16] EcoConso

Le recyclage des supports et matériaux d'impressions et ses limites

"Le tri des papiers est pourtant une obligation légale depuis le 1er juillet 2016 pour les administrations de plus de 20 personnes et les entreprises de plus de 100 salariés." [17] Pour le recyclage du papier mais aussi pour les : cartons, emballages, cartouches d’imprimantes, lampes usagées… Le recyclage permet "une seconde vie" ou transformation de ce qui a déjà été utilisé mais à quelle limite et par quelles ressources ? Qu’en est-il des autres supports d'impression trop transformés car mélangés à des micros-plastiques ou autres produits chimiques : tickets de caisse, bâches, vinyles, supports rigides, etc? Qui ne sont pas faits que de fibres papier et qui ne peuvent être recyclés entièrement, peuvent-ils aussi être transformés ?

ConsoGlobe [18] un média de l'écologie, nous explique que les supports de base papier qui sont trop transformés ne sont plus recyclables tel le ticket de caisse. De fait, le ticket de caisse subit beaucoup de transformations. Des ajouts de produits chimiques pour que le papier ne jaunisse pas mais surtout d'une surface photosensible pour que son système d'impression "thermique" qui est à chaud soit lisible et durable dans le temps : "Même s’ils sont en papier, les tickets de caisse ne se recyclent pas. Leur taille trop petite passe à travers les mailles du filet et ils contiennent en outre de nombreuses matières toxiques, comme les bisphénols. On évite donc de les mettre dans la poubelle de tri et même de les brûler."

La fabrication et l’incinération de ces supports très transformés par des composants plastiques et chimiques rejettent des dioxines, des substances cancérigènes et des disruptifs hormonaux. De plus, certains plastiques ne sont pas recyclables car ils sont trop légers et ne contiennent pas suffisamment de matière "lisible" pour le tri. Sélectionner un support pour imprimer qui est entièrement plastique tel le PVC ou plexi est par exemple plus facile à recycler. Pour les supports bâches en vinyle, les œillets en aluminium sont retirés de la bâche en vinyle, la bâche passe ensuite au déchiquetage où les " lambeaux sont transformés en nouveaux produits, tels que les cônes de signalisation " [19], la bâche vinyle peut aussi être transformée si on ne la recycle pas. Dû à son côté imperméable et très résistant, ce support d'impression peut être réutilisé en tapis de sol, protection de surface perméable ou recousu en objets tel des pochettes d’ordinateurs, ou encore des couvertures de carnets et couvertures de livres comme le pratique Redo Papers [20] : deux graphistes à Anvers qui se réapproprient des matériaux dans l'industrie de l'imprimerie tel des bâches usagées. Ces techniques de recyclage sont déjà un pari gagnant pour l'imprimerie mais nous verrons que la gestion des déchets émet une pollution environnementale et nocive pour l'humain et que son cycle n'est pas infini. Par exemple, nous avons vu dans la fabrication de papier que son recyclage de fibres n'est possible que 7 fois.

Pour le contrôle des flux de papier et le recyclage, les déchets de papier sont en général classés en fonction de leur provenance (papeterie, déchets non imprimés et imprimés de "haute qualité" et déchets imprimés ou non de "basse qualité"). Ils sont aussi triés en fonction de leur taux de fibres recyclées (sachant qu'un papier est appelé "recyclé" s'il contient au moins 50% de fibres recyclées) et des traitements chimiques subits aux papier: "le papier peut être désencré ou non, blanchi ou non, avec ou sans chlore". Le papier le plus "écologique" est celui 100% recyclé (non désencré, non blanchi et de couleur gris/beige clair), car "l'intégration de déchets papier dans la fabrication de la pâte en usine permet de faire des économies de bois, d'énergie et d'eau. La production de papier 100% recyclé économise environ 90% d'eau." Cependant il existe du papier recyclé coloré. [21]

[17] D'après Le papier : premier déchet du bureau par Agir pour la transition
[18] ConsoGlobe
[19] Bâche-publicitaire.com - "Les différentes étapes de recyclage des banderoles"
[20] Redo Papers
[21] Ecoconso

La gestion des déchets dans l'industrie de l'imprimerie et l'évolution des technologies de l'imprimé

La gestion des déchets dans l'imprimerie est complexe, il ne s'agit pas de recycler uniquement les déchets papier, il est aussi question des encres, des emballages, des fixateurs, des solvants de nettoyage, ... Bookletprint [22], des imprimeur·euse·s au Royaume-Uni nous explique : "La part la plus importante des déchets solides, liquides et gazeux produits dans l’industrie de l’imprimerie avant, pendant et après le processus d’impression est constituée des encres utilisées, des solvants émergeant après le lavage en machine, des eaux usées, de révélateurs et de fixateurs de plaques et de films, des déchets de papier, des déchets de films, des impressions défectueuses, des solvants de nettoyage et des émissions de composés organiques volatils (COV) résultant de l’utilisation de l’IPA (Isopropanol – utilisé pour l’extraction et purification de produits naturels tels que huiles et graisses végétales et animales). En tant que secteur étroitement lié à l’environnement, l’industrie de l’imprimerie dépend de l’utilisation des matières premières naturelles pour la production de papier, d’encre et de produits auxiliaires d’impression. L’utilisation de papier en tant que produit final sous-entend un processus incontournable de fabrication nécessitant la consommation des matières premières et, de facto, créant des déchets. C’est d’ailleurs pour cette raison que le recyclage du papier joue un rôle important dans l’équilibre de l’écosystème en réduisant théoriquement la production de déchets et l’utilisation de ressources naturelles “neuves”. {...} En général, tous les déchets se présentent sous trois formes, à savoir : les déchets solides, les eaux usées (déchets liquides) et les émissions atmosphériques (les déchets gazeux). L’encre, le papier et les déchets chimiques peuvent être solides, liquides et gazeux dans l’industrie de l’imprimerie.

Bookletprint définit aussi l'impact de l'encre sur l’environnement, en voici les quatres matériaux fondamentaux : "pigments, adhésifs, solvants et additifs. Les encres liquides contiennent des pigments ou des colorants. La teneur en métaux lourds (le dioxyde de titane, le chromate et le molybdène) de ces colorants contribue à la pollution de l’environnement. Les encres contiennent des niveaux élevés de composés organiques volatils (COV), ce qui présente donc un danger pour la santé humaine. Tous les solvants des encres d’impression (à l’exception de l’eau) sont des contaminants de l’air. Par conséquent, les déchets d’encres doivent être recyclés dans le cadre d’une procédure de transformation contrôlée afin de protéger la santé humaine et l’environnement. La meilleure méthode de transformation contrôlée est le recyclage ou la combustion du solvant.
Les encres offset par exemple, ont tendance à être brûlées. Les solvants sont alors brûlés et éliminés par trois méthodes : combustion thermique, combustion catalytique et condensation de refroidissement.

Les techniques de recyclage de solvant sont : l'échappement des solvants organiques par les séchoirs des presses d'impressions dans une armoire congelée par du charbon actif. Ensuite ils sont transférés pour être refroidis et la vapeur et les solvants sont condensés et divisés pour le processus de recyclage. Les solvants recyclés sont ensuite réintégrés à la vente ou réutilisés comme solvant de dilution dans la presse à imprimer. La combustion quant à elle, neutralise ou rétrécit de manière hygiénique le solvant ou s'utilise pour générer de l'énergie avec les déchets solides.

Toutes ces méthodes d'impressions ont un impact sur la pollution et par conséquent sur le réchauffement climatique. Le recyclage et la réutilisation de déchets provenant de matières premières naturelles réduisent les coûts, économisent de l’énergie et soutiennent l’économie nationale. Pour conclure Bookletprint estime que chaque imprimeur doit définir un plan de gestion des déchets. Un plan qui veille : "à privilégier les matières premières respectueuses de l’environnement, en minimisant la production de déchets dans le processus de production et en recyclant les déchets générés. L’utilisation de matières premières non recyclables et dangereuses doit être maîtrisée."

A plus petite échelle, se développent des alternatives d'impression dont celle de la risographie issue des années 1980. Son principe est le miméographe, une technique de pochoir, proche à la sérigraphie mais mécanisée. Elle réduit de façon considérable la consommation d'énergie et sa technologie à jet d'encre froid réduit radicalement l'impact sur l'environnement. Les machines produites par l'entreprise Riso, son prises en charge pour le recyclage des encres et des toners par le fabricant. Cependant, cette méthode d'impression n'est pas adaptée pour tous les imprimés, son format maximum est l'A2 et sa reproduction incertaine dû aux pochoirs ne permet pas un rendu similaire à chaque passage à l'impression. Cette impression particulière convient pour des éditeurs indépendants, illustrateurs et fanzines à petit format.

Il existe l'impression Jet d'encre par Comcolor de Riso. L'article RisoFrance, La technologie riso, une eco-gamme, [23] nous explique qu'elle permet de limiter nos besoins élèctriques lors de ses impressions : "Les imprimantes ComColor consomment ainsi moins d’électricité que les copieurs et imprimantes traditionnels". Elle consomme moins d'électricité, rejette moins de CO2, possède une encre moins polluante et moins nuisible pour la santé : "contrairement aux systèmes laser à base de toner, vous n’êtes exposés à aucune émission d’ozone et les émanations de composés organiques volatils se trouvent fortement réduites. L’ozone est irritant pour les voies respiratoires, les muqueuses et les yeux."

Cependant les méthodes d'impression les plus courantes restent l'Offset et l'impression digitale qui sont plus adaptées à l'impression papier et aux différents supports d'édition. Le choix de l'offset reste majeur pour les impressions à grande échelle et l'impression digitale un choix pour les impressions plus rapides en petite quantité et à petit prix. On la retrouve dans nos commerces, au bureau ou à la maison. "Le processus d’impression ne nécessite pas la fabrication de plaques d’impression, comparé à d’autres méthodes, ce qui rend les coûts de lancement de production bas. L’impression digitale est utilisée pour imprimer une variété de surface comme le papier ou le plastique. Il existe deux types d’imprimantes digitales. La première est l’imprimante à jet d’encre et la seconde est l’imprimante laser. [24] Contrairement à l'Offset, l'impression digitale n'imprime qu'en CMJN (cyan, magenta, jaune, noir) et ne reproduit pas les encres de pantone.

Pour terminer, l'encre végétale est une alternative aux encres pétrochimiques (des solvants issus d’hydrocarbures remplacés par des huiles végétales). Les avantages de l'encre végétale sont : l'impact réduit sur l’environnement, un meilleur transfert de la couleur : les teintes paraissent plus brillantes et plus intenses, une bonne stabilité entre eau et encre : la vitesse de l’impression augmente et il y a moins de pertes, un bon séchage et une résistance au frottement optimale. Le blog : J'imprime en France [25], nous explique aussi les composés de l'encre végétale : "des composés organiques issus des végétaux (cellulose, résine, sucre, amidon…). Pour sa fabrication, on mélange des huiles végétales (lin, soja, colza, tournesol, coco…) et des résines d’origine naturelle (extraits de pins). Les huiles végétales sont beaucoup plus « propres » que les huiles minérales qui contiennent des hydrocarbures. De plus, même si les pigments utilisés sont des produits de synthèse non renouvelables, ils sont tout de même biodégradables." En revanche, les huiles contenues dans l'encre ont souvent une provenance et composition inconnue, potentiellement issue de l’agriculture intensive. L'obtention d’informations précises est compliquée. De plus, les encres végétales peuvent être à l’origine du phénomène de maculage (tâches ou traces d'encres) dû à leurs huiles, et ces défauts sont peu appréciés dans l’impression.

La gestion de ces déchets est très importante en termes de minimisation des dommages sur l’environnement, d’où le développement des produits recyclés. En intégrant des techniques de recyclage dès le processus de production en plus du recyclage " post-consommation ", l’écosystème tend à devenir renouvelable et durable.

[22] Bookletprint
[23] RisoFrance, La technologie riso, une eco-gamme
[24] Nous explique LimePack : "tout ce qu'il faut savoir sur l'impression digitale"
[25] J'imprime en France

Le choix du papier et sa certification

Nous avons vu que la surexploitation du bois, principalement dans les forêts hors Europe, nuisait au réchauffement climatique. C'est pour cela qu'un contrôle du flux de la consommation et de la production du papier est essentiel. Nous savons que le recyclage et le choix d'un papier recyclé aux moindres coûts écologiques sont à favoriser, en amont il faut se référer à sa certification.

Les labels contrôlent toutes cette production et la durabilités de cette ressources renouvelable. "Comme de nombreux produits, les papiers à copier, les papiers imprimés, les cahiers ou encore les enveloppes signalent leurs qualités et avantages environnementaux à l’aide de logos, labels ou autres allégations environnementales. Ces signes et slogans se multiplient et il est souvent difficile de s’y retrouver. Voici quelques repères pour comparer et choisir des produits selon leur impact sur l’environnement. Les signes les plus répandus sont regroupés selon trois thèmes : l’origine de la fibre, les produits finis et les sites de production." [26] Les labels souvent européens ont des critères à respecter, des cahiers des charges à remplir et doivent faire preuve de transparence sur leur gestion. Ils possèdent un bilan à impact réduit sur l'environnement.

Les différents label de papier certifié les plus connus [27] :

Écolabel européen : "est apposé sur toutes sortes de produits papier, il garantit une fabrication à base de fibres recyclées et/ou vierges d'origine durable ainsi que la limitation de substances nocives pour la santé et l'environnement."

NF environnement : "garantit du papier à base de fibres durables et/ou recyclées, de qualité équivalente aux autres produits du marché, et provenant de sites de production peu polluants."

Cygne nordique/Nordic Swan : "ce label indique un papier produit à base de fibres issues de forêts gérées durablement et/ou de fibres recyclées, selon un processus de production faiblement polluant et économe en énergie."

Blue Angels (Blauer Engel) : "est apposé sur des papiers répondant à des critères techniques et environnementaux sévères tels que l'exclusion de substances dangereuses et l'usage de fibres issues à 100% de vieux papiers.
La première, sans mention particulière sur le label, garantit que le papier est fabriqué à partir de fibres recyclées (au minimum 800 kg de déchets de papier sont utilisés pour la production de 1000 kg de nouveau papier avec une proportion de fibres vierges qui ne doit pas dépasser 250 kg).
>La deuxième : "100% Altpapier", garantit que le papier est fabriqué à partir de 100% de fibres recyclées post-consommation. "

Forest Stewardship Council (FSC) : est une ONG internationale qui promeut une gestion écologique, sociale et économique des forêts. "Les papiers sont produits à base de fibres de bois issues d’une gestion forestière écologiquement appropriée, socialement bénéfique et économiquement viable. FSC Recyclé signifie que le papier est fabriqué à partir de 100% de matières recyclées (dont un minimum de 85% est issu de la post-consommation)."

Le Programme de reconnaissance des certifications forestières (PEFC) : est une organisation internationale de certification forestière qui promeut la gestion durable des forêts dans le monde. "papiers produits issus de fibres de bois provenant de forêts gérées de façon durable. PEFC Recyclé signifie que le papier est fabriqué à partir de minimum 70% de matières recyclées."

[26] Citeo — Comprendre les logos et labels environnementaux pour les papiers
[27] Ecoconso

Prépresse, traitement des fichiers

Généralement, le designer graphique a recours à une série de logiciels informatiques pour mener à terme son projet. Lors de la conception d'un imprimé, le format de celui-ci ne prend pas toujours en compte les formats standards des papiers utilisés en impression. Cela génère beaucoup de chutes de papier perdues après le rognage du document. De plus, dans l'imprimerie traditionnelle, un tiers parfois du papier est utilisé en feuilles de passe (feuilles qui permettent les réglages de l'imprimante pour les couleurs, quantité de jet d'encre, calages, etc). Ces chutes vont (re)vivre le cycle du recyclage qui coûte en eau, bois et électricité, alors qu'elles pourraient être utilisées plutôt qu'englobées dans le circuit du papier usagé.

Toutefois il existe des designers qui ont pris connaissances de ces pertes économiques et écologiques et qui dorénavant collaborent avec les imprimeur·euse·s pour rentabiliser ces passages à perte. Notons "Surfaces Utiles" [28] qui imprime des spécimens typographiques dans ces surfaces à fond perdus avec sa revue typographique : "La perruque", une collaboration entre le designer et imprimeur·euse pour une utilisation responsable du papier lors de l'impression.

Dans le secteur de l’imprimerie offset qui produit des livres, des magazines, des journaux, des documents commerciaux, des catalogues, des formulaires, etc, le papier est une source de déchet inévitable. Pour une commande chez l'imprimeur·euse, voici quelques conseils de l'article Le papier : premier déchet du bureau par Agir pour la transition [29] : penser une mise en page rentable en impression, optimiser le passage d'encre sur la feuille en minimisant les chutes de papier et découpe, choisir un grammage adapté et un papier respectueux de l'environnement (recyclé ou labelisé), éviter le pélicullage ou autres traitements qui rendent le papier difficilement recyclable et estimer correctement le nombre d'impression. Ces bons réflexes gagnent en coûts écologiques et facilitent le recyclage. Mais rappelons que la gestion de déchets est obligatoire même si vous choissisez des supports d'impression non recyclables.

[28] Surfaces Utiles : "Surfaces Utiles partage des pratiques artistiques et typographiques amatrices-professionnelles. Chaque nouvelle publication est aussi pour la maison d’édition l’occasion de chercher des modèles économiques alternatifs à l’industrie de l’édition, en complicité avec ses acteurs, et notamment par l’appropriation et le détournement des processus d’impressions standardisés. Surfaces Utiles édite notamment La Perruque, une revue de typographie de 1 × 90 cm de long imprimée en douce, dans les marges de tirages offset."
[29] Le papier : premier déchet du bureau — Agir pour la transition

La production de livres à grande échelle, le problème du Pilon

Une fois le livre imprimé, la diffusion et la distribution peut avoir lieu. Le Syndicat national de l'édition (SNE) [30] nous définit cette organisation de diffusion et les opérations commerciales des éditeur·ice·s : "elle peut être intégrée dans les services de la maison d’édition, mais se voit le plus souvent confiée à une structure qui se consacre exclusivement à cette activité. Les équipes de représentants peuvent être spécialisées en fonction des circuits de vente" sous différents réseaux et niveaux de vente : libraires, vente en ligne, Amazon... La distribution de livre a une importante empreinte carbone lorsqu'elle est mondialisé. Pour la distribution internationale, le livre est transporté en avion et/ou en bâteau, des transports connu pour être très polluants contrairement aux trains ou camions. Quant à la production de livres à grande échelle, les maisons d'édition rencontrent un problème, celui du pilon. Le pilon, c'est des tonnes de livres imprimés et emballés mais qui ne vont probablement jamais partir en vente dû au surplus de stock ou qui ont été renvoyés par des lecteurs. Cette surproduction alimenté par la production délocalisée aux tarifs très compétitifs agrave les coûts écologiques et l’ambition de éditeur·ice.
Cependant même si la destruction de ces livres dégage des toxines polluantes, le recyclage du papier permet heureusement la réutilisation de ces fibres non-usagées. La quantité de livre à produire est difficile à évaluer pour les éditeur·ice·s, de plus la lecture numérique vient troubler ces estimations. La production délocalisée, majoritairement hors Europe, propose des quantités étonnantes à très bas prix pour un possible succès du livre, cependant à quel prix éthique ? Les normes des droits de l'homme et de l'environnement sont-ils respectés ? Un article Bubblebd : "En moyenne 26 300 tonnes de livres partent au pilon chaque année en France" [31], nous explique que en moyenne ce sont 13,2% de toute la production littéraire qui est détruite. Que ce soit des livres invendus, renvoyés ou recyclés, ce chiffre déjà fort impressionnant et certainement en dessous de la réalité est le résultat de trois ans d'études (2018-2019-2020) de la Commission Environnement et Fabrication du SNE (Syndicat national de l’édition). [32]

Le film "On achève bien des livres" [33], propose un voyage à Vigneux-sur-Seine, un lieu de destruction et de recyclage du livre : le cœur du pilon. Cet essai cinématographique explore la production planifiée des déchets industriels. Ce système économique autour du gaspillage et de la surproduction y détruit chaque année : " cent millions de livres neufs ou quasi-neufs, soit un livre publié sur cinq, sont broyés et transformés en balles de papiers qui seront peu ou prou recyclées. Ici aussi se constate l'envers d’une « économie de croissance » fondée sur un gaspillage structurel et des politiques délibérées de surproduction.." nous écrit Bruno Deniel-Laurent [33]. Le livre devenu un objet industriel et commercial sous de multiples logistiques n'est plus "ouvrage de l'esprit". Dans son film, on y retrouve la transformation du pilon. Un gaspillage de ressources, libération de CO2 et émanations de composés organiques volatils. La grande production éditoriale soumise à l'industrialisation, se voit muter afin de survivre à ces prix compétitif de la surproduction et l'ère du numérique.

[30] Syndicat national de l'édition (SNE)
[31] Bubblebd : "En moyenne 26 300 tonnes de livres partent au pilon chaque année en France" rédigé par Thomas Mourier en 2021
[32] Commission Environnement et Fabrication du SNE (Syndicat national de l’édition)
[33] "On achève bien des livres " un film de Bruno Deniel-Laurent et produit par Hélène Badinter en 2012 (Titre anglais : Fiction Pulp).

Industrialisation & Délocalisation

L'ère industrielle et aujourd'hui celle du numérique s'inscrivent dans une société libérale et néolibérale où il est constamment question de profit. On peut observer des demandes et des offres croissantes via les technologies et une distance entre le producteur et consommateur qui outrepasse parfois les normes humaines de travail. Même si le livre est un objet commercial, il ne reste pas seulement une marchandise, il reste un produit culturel, la fonction sociale que le livre produit n'est monétairement pas mesurable.

Depuis l'industrialisation, la production et le marché du livre n'ont cessés de croître. Mais la délocalisation croissante des moyens de production a fait basculer le secteur de l'édition dans une course commerciale qu'il est aujourd'hui nécessaire de questionner. Pour des commandes de matériel, d'impressions ou de mains d’œuvre, le coût d'exportation et production dans les pays hors EU sera toujours plus faible là où les normes de travail éthiques et écologiques y sont quasi inexistantes. Ce système se situe dans un cycle constant de surproduction, surconsommation et surproduction de déchets.

Les prix très compétitifs hors EU sont très séduisant·es pour les éditeur·ices à petits moyens qui souhaitent survivre. La majorité des beaux livres sont à présent imprimés en Chine où les salaires et conditions de travail sont non-réglementées [34]. "Au XVIe siècle, les conquistadors pillaient les mines d'argent du Nouveau Monde grâce à la force de travail des Aztèques afin d'échanger cette richesse en Chine contre de la soie, de la porcelaine et des épices. Aujourd'hui, on échange des dollars canadiens contre un nombre infini de biens fabriqués en Chine ou dans les pays limitrophes. Les salaires de misère qui sont consentis en Asie permettent à des entreprises d'ici d'empocher ou de maintenir leurs marges de profit. Or cette pratique généralisée commence à toucher durement l'édition traditionnelle. Plusieurs capitales du bas salaire impriment de plus en plus de travaux de l'Occident, surtout les ouvrages en couleurs reliés dont l'assemblage demande plusieurs manipulations." Ces petits salaires permettent aux éditeur·ice·s de survivre et obtenir quelques revenus à leur tour. Les grands acteurs comme Amazon dérégule cette chaine du livre très peu rentable et fragile. Ces grandes structures font profit à tous les étages (pas seulement dans la filière du livre) et proposent également des prix très compétitifs. "Numéro un mondial sur son marché, Amazon est bien le leader du commerce électronique avec une capitalisation boursière qui environne les 250 millions de dollars. Si au départ, il ne s’agissait que d’une libraire de la nouvelle économie, le site est désormais un distributeur généraliste mondialisé (alimentaire, habillement, produits électroniques, équipement automobile…). Il offre aussi de nombreux services aux professionnels : logistique, distribution e-commerce, hébergement informatique ou facturation. Tout est presque sur Amazon !" [35]

Les coûts d'activation d'une presse sont chers, plus on imprime d'exemplaires au moins ils coûteront à l'unité dû à l'activation. Cette diminution du prix peut influencer le nombre d'impression réellement nécessaire au besoin du client. Ces lieux d'impressions et services délocalisés ne respectent pas la gestion des déchets car les normes y sont différentes. Par sa délocalisation, cette offre est accessible sur internet ou via des sous-traitants d'imprimeur·euse·s. De plus, des commandes et services délocalisés dépendent aussi des transports polluants. L'usager final ou le lecteur n'a pas toujours conscience des conditions de fabrication du livre qui arrive dans sa librairie de quartier. Les pays sous notre régime économique et d'exploitation manquent de moyens et acceptent des emplois à petits salaires.

Face à cette surproduction et les services délocalisés, le Manifeste par Wildproject -" Le livre est-il écologique - Matière, artisans, fictions" ? [36] : rêve d'un monde où le pilon n'existe pas et où les livres se partagent et demeurent dans le temps. Iels rêvent d'une bibliodiversité et de trois écologies du livre où ses principaux aspects seraient : matériels, sociaux et symboliques. " L'écologie du livre est une invitation à penser l'ensemble des acteurs et actrices du livre et leurs interactions comme formant un écosystème — c'est-à-dire un milieu de vie, tissé et soutenu par un réseau d'interdépendances " (page 89). Leur vision cherche à dévoiler une complexité qui oblige à de sérieuses réflexions collectives. Leur approche ouvre un questionnement transversal sur les savoir-faire, les modes de fonctionnement et les pratiques de l'ensemble de la chaine du livre. Il s'agit de penser des organisations résilientes contrairement au livre qui se massifie et qui en même temps se fragilise.
Dans l'écologie matérielle, le livre est questionné sur sa tendance manufacturée et sa matérialité coûteuse à l’environnement : papier, encre, reliure, couverture pélliculée, ...). " Le nombre de nouveautés publiées chaque année en France a triplé en vingt-cinq ans, et près d'un livre imprimé sur cinq y est aujourd'hui détruit sans avoir été lu, car cela coûte moins cher à l'industrie que de le remettre en circuit — ces livres deviennent plus souvent des cartons d'emballage que d'autres livres. {...} Enfin l'essor du numérique (dont l'empreinte écologique grandissante appelle à penser des modèles sobres et territorialisés) ouvre de nouvelles possibilités intéressantes mais entraîne également la reproduction, dans le monde virtuel, d'un modèle industriel peu soutenable — dont Amazon est le symbole le plus frappant."(page 93). Ensuite du point de vue de l'écologie sociale, le livre est définit comme une œuvre car elle implique divers gestes de création : écriture, illustration, édition, maquette, impression, vente, etc, mais tous ces talents et savoir-faire sont bouleversés par la logique industrielle d'uniformisation, fluidification et automisation croissante des métiers dans la chaîne du livre. Le monde éditorial rêvé par Wildprojet est une économie durable, un art à profit écologique et économique. Iels souhaient offrir un modèle utile et coopératif contre les processus de marchandisation. Dans l'aspect de l'écologie sociale, l'éco-responsabilité définit la capacité de répondre de nos actes dans une perspective écologique et une organisation détachée de l'extractivisme. Finalement le point de vue de l'écologie symbolique explique que le livre est un support de transmission de savoirs, idées et imaginaires et qu'il met à disposition des enjeux de liberté et d'équité d'expression. Il questionne "nos manières d'éduquer, de faire culture et créer" (page97).
En fait, la bibliodiversité des œuvres est une richesse culturelle mais la surproduction et la marchandisation du livre apauvrissent nos ressources naturelles. Comment les sauvergarder et ne pas céder au monoculture de l'esprit ? Diversifier la production de livre et l'appréhender comme l'écosystème d'une forêt. [37] Le Manifeste se clôture sur une question, comment métamorphoser nos livres à la hauteur de notre époque et ses défis écologiques ?

[34] Livres - Impressions de Chine par Le Devoir
[35] Quel est le secret du succès d’Amazon ? — Channel Vision Magazine
[36] Un Manifeste : Le livre est-il écologique - Matière, artisans, fictions par Les Éditions Wildproject
[37] Monocultures de l’esprit écrit par Vandana Shiva, Les Éditions Wildproject : "Que se passe-t-il lorsque seuls certains types de plantes et de personnes sont valorisés ? Dans Monocultures de l’esprit, la penseuse indienne Vandana Shiva s’attaque à ce qui pourrait être le problème central du « développement » : en maximisant certains types de production, nous éliminons systématiquement tous les autres types de vie, humaine et non humaine. L’autrice analyse de façon méthodique comment une certaine vision de la science portée par l’Occident a conduit à un système de monoculture dans l’agriculture et la foresterie – un modèle qui est en train d’être imposé à tous les pays des Suds, où il supplante des systèmes ancestraux véritablement durables de ces sociétés, et plonge des millions de personnes dans la pauvreté. Pour lutter contre ces monocultures de l’esprit, Shiva appelle à une démocratisation des savoirs légitimant la diversité, et à une « insurrection des connaissances subjuguées ». Cinq essais militants et accessibles sur les véritables implications de la monoculture, par une des plus grandes altermondialistes du Sud global."

L'impact carbone du numérique

Publier à l'ère du numérique devient une pratique protéiforme aux réseaux de diffusion multiples : du fichier à télécharger en passant par des plates-formes de streaming, les réseaux sociaux, les articles en lignes, les posts de blog, les bibliothèques numérisées... Ces différents médias dépendent de logiciels, systèmes d’exploitation, navigateurs et de serveurs.

L'externalisation ou décentralisation de nos données se fait presque automatiquement lors de la dématérialisation de celles-ci. Les espaces de stockages des données sont sur des serveurs centralisés dans de grandes infrastructures en général installés dans les pays froids. Cette installation est dûe aux enjeux énergétiques qu'engendrent ces milliers de serveurs rassemblés pour l’hébergement de données. Elles coûtent en électricité mais surtout en refroidissement car des datacenters en continuel fonctionnement surchauffent rapidement. Nous sommes constamment connectés à ces serveurs énergivores et il est difficile de concevoir cette pollution invisible numérique. La pollution numérique ce sont les effets négatifs que peuvent impacter les technologies numérique de communication et diffusion. La consommation non négligeable de l'électricité pour ces systèmes et leur exploitation ainsi que leur transformation en déchets sont très polluant.

"En moyenne, les serveurs et les systèmes de refroidissement représentent les parts les plus importantes de la consommation directe d'électricité dans les centres de données, suivis des disques de stockage et des périphériques réseau. Certains des plus grands centres de données du monde peuvent chacun contenir plusieurs dizaines de milliers d'appareils informatiques et nécessitent plus de 100 mégawatts de capacité électrique, soit suffisamment pour alimenter environ 80 000 foyers américains (US DOE 2020). [38]

À mesure que le nombre d'utilisateurs d'Internet dans le monde a augmenté, la demande de services de centres de données a également augmenté, ce qui suscite des inquiétudes quant à la consommation croissante d'énergie des centres de données. Entre 2010 et 2018, le trafic IP mondial - la quantité de données transitant sur Internet - a plus que décuplé, tandis que la capacité de stockage des centres de données mondiaux a été multipliée par 25 en parallèle. Au cours de la même période, le nombre d'instances de calcul exécutées sur les serveurs du monde (une mesure du nombre total d'applications hébergées) a plus que sextuplé [39].

[38] Energy Innovation : Quelle Quantité D'énergie Les Centres De Données Utilisent-Ils Vraiment ? (2020)
[39] Masanet et al. dans Energy Innovation : Quelle Quantité D'énergie Les Centres De Données Utilisent-Ils Vraiment ? (2020)

Ces fortes tendances de croissance devraient se poursuivre alors que le monde consomme de plus en plus de données. Et de nouvelles formes de services d'information telles que l'intelligence artificielle (IA), qui sont particulièrement gourmandes en calculs, pourraient encore accélérer la croissance de la demande. Par conséquent, la capacité de quantifier et de projeter la consommation d'énergie des centres de données est une priorité clé de la politique énergétique et climatique.

L'article "Le monde informatique : Face aux pics de chaleur, les datacenters français en surchauffe ?" [40] nous explique que les infrastructures numériques et surtout les "dataservers" participent aux pics de chaleur et qu'ils sont conçus pour résister à des températures extérieures plus grandes : " Les équipements retenus dans un design de datacentre et des groupes froids notamment, fonctionnent sur des plages de températures élevées. Il est commun aujourd’hui d’obtenir des fiches de sélections des groupes froids, offrant des amplitudes de fonctionnement supérieures à 40°C, sans dégradation des performances."

Le mémoire : Vers la sobriété numérique - Anaël Le Gall (ESAC Cambrai, 2023) [41] nous énonce également quelques chiffres de la consommation des datacenters : "Véritable problème environnemental, ces datas centers représentaient en 2017, plus de 20% des dépenses en électricité du secteur de la technologie de l’information (en précisant que 50% des datacenters dits “hyperscale” [Nom donné aux datacenters de plus de 5000 serveurs et 3000m²] sont détenus par les GAFAMs. Pour les utilisateurs du réseau, il est difficile de concevoir cette pollution numérique puisque la donnée est abstraite, volatile, et internet complexe et non tangible. Nous avons tous des espaces de stockage dans le cloud [Espace de stockage décentralisé sur un serveur externe. Contrairement à un stockage local directement une machine] auxquels nous ne faisions pas forcément attention, des mails qui s’entassent dans notre boîte de réception, des Google Drive laissés à l’abandon. Mais mis bout à bout, cela représente des quantités d’informations énormes agrégées en permanence sur des serveurs énergivores. Quand la poubelle est pleine, on la vide, et ça devrait être pareil sur l’espace numérique."

Les Pepites Vertes [42] une communauté pour la transition écologique et orientation aux enjeux environnementaux nous explique : " Les promoteurs des technologies de l'information et de la communication soutiennent que les flux d'information, qu'ils disent « dématérialisés », réduisent l'impact des activités humaines sur l'environnement, en diminuant les ponctions sur les ressources naturelles par une meilleure organisation de la production et de la consommation. Leurs critiques estiment que cette réduction est illusoire et que cette perception se fonde sur la discrétion des consommations numériques, opposée à la visibilité des moyens de transmission matériels, comme dans le cas d'un courriel remplaçant un courrier. Pourtant, la plus grande disponibilité de la ressource entraîne par un effet rebond l'augmentation de la consommation, réduisant ou annulant le gain. {...} Exemple : La lecture d'un document sur ordinateur pèse moins sur l'environnement que la transmission sur papier — à condition de ne consulter qu'une fois et de passer moins de trente minutes à l’écran…. La facilité d'envoyer des messages en masse entraîne la prolifération d'usages parasites de l'informatique comme le « pourriel », qui représente plus de la moitié des courriels envoyés dans les années 2010 et pèse sur le coût énergétique final des messages utiles."

Les Pepites Vertes [42] nous signalent que la technologie numérique peut avoir un impact positif malgré sa surconsommation dématérialisée. Elle permet d'obtenir des informations grâce à la puissance de calcul des ordinateurs mais surtout de définir l'état de la planète et de nous en alerter. La technologie "peut rendre possible la gestion des énergies renouvelables, souvent intermittentes et réparties en petites unités indépendantes sur un vaste territoire. L'organisation d'un réseau électrique intelligent vise ainsi à diminuer les pertes et à organiser la production dans une vaste zone géographique."

Par exemple, le low-tech magazine [43] innove en proposant un serveur lié à l'énergie solaire, leur magazine n'est donc pas consultable en permanence. Mais l'accès permanent est-il une donnée indispensable pour diffuser ? Les librairies ferment le soir donc pourquoi pas les serveurs ? Le site est conçu pour réduire radicalement la consommation d'énergie associée à l'accès au contenu : "Afin de compenser les conséquences négatives associées à une forte consommation d'énergie, les énergies renouvelables ont été proposées comme moyen de réduire les émissions provenant de l'alimentation des centres de données. Par exemple, le rapport annuel ClickClean de Greenpeace classe les principales sociétés Internet en fonction de leur utilisation de sources d'énergie renouvelables. Cependant, faire fonctionner des centres de données sur des sources d'énergie renouvelables ne suffit pas pour faire face à la consommation énergétique croissante d'Internet. Pour commencer, Internet consomme déjà trois fois plus d'énergie que toutes les sources d'énergie éolienne et solaire dans le monde ne peuvent en fournir. De plus, la fabrication et le remplacement régulier de centrales électriques renouvelables nécessitent également de l'énergie , ce qui signifie que si le trafic de données continue de croître, l'utilisation de combustibles fossiles en fera de même. [...] Pour commencer, le contenu devient de plus en plus gourmand en ressources. Cela a beaucoup à voir avec l'importance croissante de la vidéo, mais une tendance similaire peut être observée parmi les sites Web. [...] Une deuxième raison de la croissance de la consommation d'énergie sur Internet est que nous passons de plus en plus de temps en ligne." La conception de site Low-tech résout ces deux problèmes et propose des choix graphiques "sobre" : des images tramées, des polices par défaut et pas de suivi tiers, publicités ou de cookies.

[40] "Le monde informatique : Face aux pics de chaleur, les datacenters français en surchauffe ?"
[41] Le mémoire : Vers la sobriété numérique - Anaël Le Gall (ESAC Cambrai, 2023)
[42] Les Pepites Vertes : une communauté pour la transition écologique et orientation aux enjeux environnementaux.
[43] Low-tech Magazine par Kris de Decker

Le designer en tant que messager

"On travaille avec la psychologie des gens, on cherche à savoir comment va être reçu notre travail, quelle réaction nous allons créer dans notre audience." Guillaume Slizewicz. [44]

Face à ces constats décrits dans la première partie, la volonté première du designer ne serait-elle pas de repenser les chemins et les manières de faire le design qui est toujours lié aux enjeux et aux techniques de son époque ? Comment créer en conscience aujourd'hui ? Il est possible de déployer de nouveaux modes de production plus écologiques, de collaborer autrement avec les imprimeur·euse·s, de récupérer le papier ou matériaux d'affiches et d'approcher le numérique avec une vision lowtech.

Une conférence gesticulée de Thomas Thibault (Collectif Bam) [45] suivie d’une discussion avec Carine Thibaut (Greenpeace) et Stéphanie D’Haenens (IEB), énonce "Les déchets électroniques pèsent aujourd’hui plus que la Muraille de Chine. Le numérique prend une place de plus en plus importante dans le dépassement des limites planétaires, bien loin de l’immatérialité vendue. Extraction de ressources, pollution ou consommation énergétique : les conséquences environnementales des serveurs, câbles ou terminaux croissent chaque année."

Les Presses du Réel [46] nous résume les enjeux du livre de Victor Papanek : Design pour un monde réél : écologie humaine et changement social [47], où la mission du designer graphique est l'inclusion sociale plutôt que le profit et l'extractivisme de nos ressources. "Réédition critique en français d'un ouvrage absolument précurseur et fondamental pour l'inclusion des problématiques sociales, environnementales et des enjeux de durabilité dans les démarches de conception : le manifeste d'une reconfiguration radicale du domaine du design, de ses formes mais surtout de sa mission. Paru en 1971, publié dans plus de vingt langues, mais indisponible en français depuis 1974, Design for the Real World est, bien plus qu'un classique de l'histoire du design, le livre-manifeste de tout design politique et écologique. Il vise l'inclusion sociale plutôt que le profit monétaire, lutte contre l'asservissement des besoins au marché, prône le respect de l'environnement plutôt que l'exploitation illimitée de la nature et de ses ressources. Cette réédition critique de la traduction française, accompagnée d'essais d'Alison J. Clarke et Emanuele Quinz, offre un aperçu du programme de Victor Papanek : confier au design une mission révolutionnaire, qui, aujourd'hui plus que jamais, révèle son étonnante pertinence."

En fait, il y a une nécessité d'informer sur l'urgence de ces luttes écologiques et économiques par notre métier. Pour renverser cette croissante inflation économique et la consommation énergétique non renouvelable. Grâce à une prise de conscience grandissante, la lutte écologique se développe et influe nos choix graphiques. Le médium utilisé pour communiquer et diffuser fait sens dans le design et mute nos usages. Tel Marshall McLuhan et son livre : "Le médium est le message" : le contenant de l'information est égal à l'importance de son contenu. Notre médium papier ou écran et pratique sur celui-ci raconte tout autant que son contenu. [48].

[44] Guillaume Slizewicz : un jeune graphiste français basé à St-Gilles.
[45] Collectif Bam (devenu "Praticable") : est une coopérative qui favorise l'autonomie par le numérique.
[46] Presses du Réel : une maison d'édition indépendante et une société de diffusion et de distribution basée à Dijon.
[47] Victor Papanek : Design pour un monde réél : écologie humaine et changement social
[48] Le Monde - " Le message c'est le médium "

Nous avons vu que l'extractivisme et le non-renouvelable étaient fort présent dans les productions industrialisées et délocalisées. Ces modes de productions impactent le réchauffement climatique et sont dans une constante : surexploitation, surproduction, surconsommation et finalement surproduction de déchets. Deux termes qui pourrait définir l'avant et l'après d'un design devenu conscient serait : l’obsolescence et la résilience. La construction de projets éditoriaux qui pensent la post-production, le renouvelable et la durabilité pour résister aux enjeux des crises écologiques et économiques sont résilient.

L’Obsolescence : est un terme qui définit quelque chose qui est ou va être périmé, dont l'espérance de vie est prédéterminée et non infinie. C'est une dépréciation d'un matériel ou d'un équipement avant sa réelle usure matérielle. Dans le secteur du numérique on fait souvent face à l’obsolescence programmée pour des logiques commerciales (avancées technologiques nécessitants des appareils de plus en plus puissants). Il s'agit d'une fabrication de produits avec une fin déterminée pour que le consommateur soit obligé d'en acheter un nouveau. Cette course technologiques induit des comportements de consommation qui participent évidemment au phénomène de la surexploitation. Le produit n'est conçu ni pour durer ni pour résister au temps, il vieillit et devient alors dépassé.

Des réalisations éditoriales peuvent aussi être obsolètes, de par leur conception parfois fragile et souvent peu chère mais surtout par les contenus liés à de l'évènementiel (actualités, revues, ...) ou à des tendances... On parle ici de "l'obsolescence psychologique [qui] résulte d'effets de mode ou de la mise sur le marché de nouveaux produits paraissant plus efficaces ou séduisants, souvent à l'aide de la publicité." [49] Le contenu par exemple imprimé au quotidien dans un journal devient vite obsolète dû à son contenu d'actualités à court terme.

Un terme qui s'oppose à l’obsolescence c'est la la Résilience : c'est la capacité à résister aux chocs ou une résistance à des événements liés aux temps, à des conditions indéterminées qui peuvent survenir. La résilience favorisent le long terme et la durabilité. Dans des contextes sociaux ou de cycle de vie on la décrit souvent ainsi : « La résilience est la capacité d’une personne ou d’un groupe à se développer bien, à continuer à se projeter dans l’avenir, en présence d’événements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes parfois sévères » . [50]

Des objets graphiques résilients sont ceux qui s'adaptent pour limiter la pression exercée par l'humain sur l’environnement et pour limiter les coûts.

Nos pratiques éditoriales à l'heure actuelle, dépendantes en grande partie de l'industrialisation et de la mondialisation qui gravitent autour de cette première notion : les réalisations et produits touchés par l'obsolescence n'entrent pas dans un cycle du renouvellement des ressources et ne sont pas conçu pour durer ou être transformés. L'obsolescence concerne aussi les surplus de livres qui partent au pilon. La surexploitation des ressources et la surproduction sont majoritairement dues à une politique libérale dont la croissance n'est pas régulée et qui induit des productions délocalisées où les coûts sont faibles et les normes éthiques inexistantes.

Comment les graphistes et les productions éditoriales peuvent-iels co-exister dans un secteur à croissant et sous quelles conditions ? Comment acquérir des nouvelles manières de faire le design ?

Depuis peu, des collectifs développent des pratiques résilientes. Nous y retrouvons la durabilité au travers de nouvelles confections qui sortent de cette emprise industrialisée et délocalisée. D'après Ellen McArthur et sa fondation pour construire un avenir positif à travers le cadre d'une économie circulaire : « Repenser l'avenir : C'est un défi profond, à la fin d'une ère basée sur le pétrole et les matières bon marché, de repenser et de revoir la façon dont nous produisons et consommons ; pour remodeler la façon dont nous vivons et travaillons, ou même d'imaginer les emplois qui seront nécessaires pour effectuer la transition. » [51]

[49] Wikipedia - L'obsolescence
[50] D’après un document publié en 2000 par la Fondation pour l’enfance - Paris
[51] Fondation Ellen McArthur : "est une association caritative britannique qui vise à inspirer une génération à repenser, re-conceptualiser et construire un avenir positif à travers le cadre d'une économie circulaire" - Wikipedia

Le design est un champ à reconstruire, ses conditions d'existence et les processus sont à redéfinir radicalement dans une perspective écologique et durable. Le terme « eco-design » est encore trop utilisé pour un effet tendance et non comme une force productive. Par exemple pour imprimer moins cher, certains choix peuvent être faits : des plus petits formats d'impression, une impression noir&blanc, un papier plus fin ou non coloré. Des choix prépresses standardisés et revus à la baisse chez les imprimeur·euse·s pour économiser l'impact écologique et économique. Alors que lier l'économique et des nouveaux modes de production éditoriale offrent de multiples possibilités. Nous verrons que pour baisser les coûts écologiques et économiques, il est possible d'adopter une posture d'économie circulaire, tant dans le low-tech que par la récupération de papier ou autres matériaux. La durabilité doit être un élément pris en compte dans les formes de consommation numériques et papier, et donc se traduire dès leur conception par des choix responsables, un nombre de tirages et de pages bien pensés, ou encore la création de produits plus facilement recyclables.

Transition d'un modèle économique non renouvelable

Ce qui est indéniable c’est qu’au XXIème siècle la terre est abîmée. Les conséquences des innovations et progrès croissant du XXe siècle sans en mesurer les conséquences, nous font face. Nous avons analysé les coûts écologiques de la production du papier ainsi que la diffusion sur des supports numériques. La surexploitation et raréfaction des ressources dépendent d'un certain modèle économique et social. Toutes formes de ressources et énergies sont susceptibles aux enjeux des crises actuels et la subissent sur l'inflation de leurs coûts.

The Shift Project, nous explique dans leur article ÉNERGIE ET INFLATION : DES LIAISONS DANGEREUSES [52] que l'énergie pétrolière est irremplaçable et que l'économie actuelle dépend de cette ressource fossile. "L'énergie n'est pas substituable, car elle est le « sang » de l'économie, de l'organisation économique et sociale, et de toutes nos institutions. [...] le pétrole reste l'énergie reine avec un quasi monopole ( 95 %) sur le milliard de moteurs à combustion interne qui transportent des personnes et des marchandises dans le monde."

Les énergies non renouvelables et exploitation minière comme le pétrole monopolisent l'économie et ne permettent pas une transition vers les énergies dites vertes. Par contre la raréfaction du pétrole engendre des changements et innovations énergétiques. Les ressources minières, le pétrole, et après ? - Transition énergétique : vers l’utilisation des énergies renouvelables de Donatien Njomo [53] nous parle de l'épuisement des ressources fossiles : "Dans le contexte actuel d’une demande croissante d’énergie, l’épuisement inéluctable des ressources fossiles, ainsi que le réchauffement climatique qu’elles causent, font clairement apparaître le caractère non durable du modèle énergétique en cours. Il faut donc engager une transition vers un modèle plus durable, dans lequel les énergies décarbonées auront une place prépondérante dans le mix énergétique." La raréfaction des énergies non renouvelables font augmenter les coûts et engage une transition de notre modèle économique.

[52] The Shift Project — ÉNERGIE ET INFLATION : DES LIAISONS DANGEREUSES
[53] Les ressources minières, le pétrole, et après ? - Transition énergétique : vers l’utilisation des énergies renouvelables de Donatien Njomo

Face à l'augmentation des coûts et à l'inflation, des structures éditoriales s'organisent autrement

"Les prix du papier en forte augmentation depuis janvier, une charge supplémentaire pour les écoles" nous dit l'article de la RTBF en 2022 après le confinement et la reprise des cours en présentiel [54]. "Depuis janvier, le prix du papier livré aux écoles a augmenté d’environ 50%. Cette augmentation est déterminée essentiellement par deux éléments, le prix de la pâte à papier qui a augmenté environ de 60% depuis le début de l’année et les coûts de l’énergie dont on connaît tous l’état de situation aujourd’hui. Le processus de production du papier est très énergivore ce qui explique que certaines entreprises réduisent leur production dans les moments où les pics d’électricité sont les plus élevés, une mesure préconisée par les instances européennes." Sur sept usines européennes, il n’en reste plus que quatre en activité et c'est ce déséquilibre entre l’offre et la demande qui augmentent les prix. D'après l'article, le prix d’un carton de cinq rames de 500 feuilles coûtait moins de 10 euros avant janvier, aujourd’hui il est à 18 euros (hors TVA).

L'inquiétude majeure qui pèse après le pilon et la surconsommation c'est l'augmentation des prix. La fabrication de papier coûte de plus en plus cher d'un point de vue économique qu'en terme de ressources. L'industrie du livre repose sur des pratiques aux impacts environnementaux catastrophiques, donc comment se saisir de l'écologie pour repenser en profondeur nos pratiques éditoriales ?

L'augmentation forme un coup dur pour le monde de l'édition. Les éditions du commun [55], une maison d'édition, nous explique qu'en 2022 ces coûts croissants ont fait l'objet d'un appel à l'aide. Tant l'inflation en cours que la baisse des ventes en librairies sèment le doute concernant l'économie en terme de production imprimée et face au dérèglement climatique. Les choix humains et sociaux influent aussi sur les coûts quand les maisons d'éditions décident de produire éthiquement leur livres. Malheureusement, l'éthique ne fait pas le poids face aux multinationales de surconsommation et surexploitation. Les structures éditoriales responsables demandent du temps et le soutien des lecteurs. Les éditions du commun : sont une structure à échelle humaine et à l'économie fragile, qui correspond à la volonté politique d'une mentalité juste autour des acteurs du monde du livre et le respect de cette filière pleine d’artisans. Comment réorganiser leur modèle économique avec l'inflation actuelle ? Internaliser un maximum les tâches et fonctionner en circuit court. Compter sur le fait qu'iels sont un modèle économique à taille humaine qui interagit avec son lectorat contrairement aux grosses chaînes de production qui ne rencontrent pas forcément leurs écrivain·e·s ou lecteur·ice·s. Les éditions du commun éprouvent les difficultés des structures indépendantes pérennes mais désirent poursuivre l'expérience pour renforcer ses bienfaits pour une meilleure qualité de vie et service de lecture. Les petites maisons d'édition ont du mal à survivre face à la croissante surproduction de livres à bas prix et le passage au numérique. Les éditions du commun innovent et s'installent sur différents supports de diffusion tel Instagram ou leur site disposant des podcasts, où ils y questionnent le livres, le numérique, etc. avec divers invité·e·s dont WildProject qui a publié ''le livre est-il écologique ?''. Ils dialoguent sur la survie et la mutation des formats d'éditions en tant que différents acteurs de la chaîne du livre.

Ce système économique où les géants de l'édition ignorent la bibliodiversité et les normes éthiques, est à transformer d'urgence. Timothée Parrique, [56] chercheur en économie écologique en Suède nous explique qu'il faut déconstruire l'obsession première du monde contemporain : "la poursuite de la croissance". La surproduction et surconsommation alimentent le réchauffement climatique, la pauvreté, les inégalités, et appauvrit notre qualité de vie. Cette machine capitaliste est un accélérateur de l’effondrement écologique. Comment transiter vers une économie post-croissance ? Timothée Parrique souhaite complètement repenser l'organisation de l'économie car produire plus et polluer moins ne vont pas de pair. Quel chemin prendre pour vivre et prospérer différemment durant cette lutte écologique ? Le réemploi de matérieux, le recyclage, l'économie circulaire ?

Sauvegarder et valoriser ce que l'on a comme ressources et puiser dans l'existant pour transformer ce qui a déjà été fait est une clef du changement. Comment "contrer" l’obselète, le non-résilient pour décarboner la planète ? L’écologie est un sujet imminent qui implique une mouvance de la société. Le postulat du réchauffement climatique confirmé au fil des années urge et demande une mutation de nos infrastructures. Il nous faut aujourd’hui domestiquer la vie, revoir les activités humaines dans le contexte de la consommation, production, distribution et gaspillage pour éviter la disparition progressive du patrimoine vivant et la surexploitation des ressources naturelles. Repenser nos modes de vie et conception dans un paradigme soutenable. Nous avons davantage d’artistes qui produisent localement, leurs œuvres nous touchent davantage si nous pouvons les voir en vrai ou si nous vivons les enjeux qu’elles illustrent.

[54] RTBF - "Les prix du papier en forte augmentation depuis janvier, une charge supplémentaire pour les écoles"
[55] Les éditions du commun à Rennes.
[56] Timothée Parrique, chercheur en économie écologique en Suède.

Tendre vers une économie circulaire

Le modèle d’économie circulaire favorise : l’entretien, la réparation et la réutilisation des produits. Le but est une conception adaptée des produits et leur composants en vue de leur durabilité et transformation totale ou partielle de leur composants en fin de vie. Ce modèle renouvelable vise à recycler au maximum les matériaux et déchets industriels, agricoles ou ménagers. Dans une optique d’économie circulaire, plusieurs modèles économiques innovants peuvent être envisagés : la location, le partage et usage collectif de produits et d’équipements. « La transformation de notre économie d’un modèle linéaire vers un modèle circulaire permet de réaliser des économies, de mettre en œuvre une utilisation plus efficace des ressources, de générer des emplois, et de réduire l’impact de la production et consommation sur l’environnement. » [57] Les Récupérathèques [58] sont un réseau de matériaux récupérés et prêts dans les écoles, il y'a aussi Les Petits Riens [59] une actions sociale et circulaire, des lieux de troc et dépôt de vente, etc.

La smart [60] une coopérative en Belgique, organise des débats et témoignages sur l'économie sociale pour faire émerger l’innovation sociale : "Pourquoi et comment coopérer? L’économie sociale se veut un modèle alternatif à l’économie capitaliste, dominée par la concurrence et par l’exploitation. Mais l’est-elle vraiment? Les entreprises sociales ne sont-elles pas forcées de jouer elles aussi la concurrence pour s’en sortir dans cette économie entièrement dominée par la logique capitaliste? Et cette concurrence ne se tourne-t-elle pas parfois contre d’autres entreprises sociales? Si c’est le cas pour de nombreuses entreprises, il existe pourtant une autre manière de faire. Celle qui s’oppose à la logique de concurrence du capitalisme : la coopération. Et si celle-ci reste relativement marginale dans l’économie sociale, ce n’est pas faute d’être largement prônée et défendue. Malgré que cela suppose de s’organiser, d’échanger, de s’accorder parfois sur des points sensibles… Toutes des choses qui prennent du temps et de l’énergie, et qui ne sont pas simples quand on est plongé·e dans les problèmes quotidiens de l’entreprise. Mais malgré tout, cela vaut le coup! La coopération, si elle est bien menée, et si on prend le temps de la mettre en place, a énormément d’avantages. Outre le sentiment de construire une économie différente et nécessaire face aux problèmes sociaux et environnementaux, la coopération peut aussi résoudre des problèmes matériels, renforcer des partenariats d’un même écosystème.".

Le livre est très durable et ce depuis les enluminures. Le médium du livre traverse le temps et se transforme depuis le papyrus : le premier support d'écriture tiré de fibres végétales. En plus d'être renouvelable par le recyclage, le livre entre également dans les circuits d'échanges grâce aux boîtes à livres, les lieux de rachat tel Pêle-mêle [61]. Quartier Libre : une bibliothèque coopérative [62]"Le nouvel "âge du faire" est le royaume des "makers" et des "coworkers", des adeptes du "test and learn" et du "learning by doing". Autant de nouveaux concepts, de pratiques, d'inventions, de productions et de collaborations que Quartier Libre veut accueillir et mettre au service du li(v)re. [...] Tel est notre défi : Allier le monde fragile de l'écriture, de la lecture, bref du li(v)re, et le monde du "faites-le vous-même", du digital et de la robotique." Des nouveaux formats de livre et bibliothèque voient le jour grâce au DIY et l'économie circulaire.

[57]Belgium.be — Informations et services officiels
[58]Les Récupérathèques
[59]Les Petits Riens
[60]La smart
[61]Pêle-mêle : un lieu de "recyclage culturel" et "d'occasions".
[62]QUARTIER LIBRE : "Un Écosystème éditorial, connecté, interactif et trans-média."

Comment adopter des nouveaux modes de travail et comment s'émanciper de tout ce gaspillage des ressources naturelles dans le champs du design graphique ? Une posture de hacker ou Do it Yourself (DIY) est une possibilité qui se développe et devient un modèle économique et social encouragé dans le secteur de l'innovation. Économiser nos matières premières est possible si l'on revoit à la baisse les modes de production. L'économie du partage et de la mutualisation des chaînes de production est aussi une option. Cette culture du libre accès et du partage est issue de la culture open source dans le domaine informatique dont les 4 fondamentaux du logiciel libre sont : Les libertés d'utiliser, de copier, d'étudier et de modifier les logiciels ainsi que de redistribuer.

Le livre Open Design - FABRICATION NUMÉRIQUE ET MOUVEMENT MAKER [63] explique que :"Depuis le début des années 2000 et le développement du mouvement maker, du do it yourself et de la fabrication numérique personnelle, la frontière entre experts et usagers amateurs semble s’être brouillée. En bousculant les codes traditionnels du travail et de la production, le bourgeonnement de pratiques créatives collectives au sein de communautés d’amateurs entraîne une métamorphose du capitalisme industriel tel qu’il prévalait jusqu’alors. Les activités de création et de fabrication numérique, notamment au sein des Fablabs, redessinent peu à peu les contours d’une production revendiquée comme « ouverte », libre ou décentralisée."

Cette posture de métamorphose des pratiques interagit avec des nouveaux modes de publications qui voient de plus en plus le jour alliant le numérique et le papier sous forme d'éditions hybrides. Des nouvelles pratiques numériques se trouvent également dans l'édition, et à toutes les étapes. Le monde numérique et des hackers construisent déjà depuis plusieurs décénies des créations aux enjeux politiques et engagées. Des enjeux qui questionnent les outils des designers. Comme ceux édités par Adobe : les logiciles de création par excellence, qui aujourd'hui entrent en compétition avec des alternatives politiquement plus engagées : le libre et l'Open Source. Nous repensons nos formats, outils et usages du numérique afin de nous les réapproprier pour, questionner et repenser les gestes de mise en page et de lecture. Ces nouveaux gestes impactent aussi la filière du livre.

[63]Open Design - FABRICATION NUMÉRIQUE ET MOUVEMENT MAKER

Contre-culture, se décloisonner de nos paradigmes habituels

Une émancipation des pratiques du design coûteuses et polluantes est possible lorsque l'on sort des outils propriétaires tels la suite de logiciels : Creative Cloud Adobe et que l'on s'informe sur son éthique et sur la crise écologique. "Adobe a bâti son empire sur le Mac, grâce à ses fonctionnalités dédiées à la P.A.O. (publication assistée par ordinateur) que Windows a mis bien du temps à intégrer. Apple a donc longtemps eu une relation privilégiée avec cet éditeur qui lui a fourni nombre de "killer apps" pour le Macintosh : Photoshop, Illustrator, Premiere ont fait les grandes heures du Mac" [64]. Macintosh, le système d’exploitation de la firme Apple, fait partie des GAFAMs qui occupent une majeur partie des datacenters dit " hyperscale". Les logiciels de la suite : Creative Cloud Adobe, font parties des services connectés qui impactent indéniablement le réchauffement climatique.

Quentin Juhel [65] nous définit les contre-cultures dans son mémoire Outils et désirs d'émancipation : " Un mémoire de fin d’études sur les contre-cultures. Le propos se construit autour des outils produits et des idéologies véhiculées qui continuent de transparaître aujourd’hui au travers de certaines pratiques du design. Do It Yourself, culture « hacker », libre, mouvement hippie, punk ont su proposer leur propre vision de la création, de la production, du travail et de nouvelles formes sociales. Des questions qui agitent la pratique du designer depuis plusieurs années. " Ces pratiques dont il est question sont celles qui alimentent la crise écologique et économique. Comment se défaire de ces paradigmes autour des outils et pratiques qui polluent ? Une pratique qui permet la cohabitation des ressources naturelles et de l'activité du design est possible si l'on prend en compte ses enjeux et son renouvellement. Ernst Haeckel [66], en 1866 invente le mot écologie et le définit comme tel — "l'écologie est la science des relations et des conditions d'existences". L'écologie c'est un écosystème en constante évolution avec des enjeux, des relations et une symbiose. Elle se transforme en fonction de ses interactions et inclût des enjeux actuels qui impactent nos manières de faire et nos pratiques éditoriales.

L'esprit hacker

Etienne Ozeray [67], dans son mémoire : Pour un design graphique libre nous définit cet " esprit hacker" qui s'émancipe des pratiques coûteuses et polluantes tels les logiciels propriétaires qui ont le monopole. Le hacker prône l'utilisation de logiciels open-source et libres. Il explique que manier le code c'est ouvrir ses possibilités dans le champ du design graphique : "Divers systèmes ont été mis en place afin de produire des formes graphiques par l’utilisation de procédés déviés de leur fonction initiale. Les outils ont été adaptés à la pratique et non l’inverse, chose qui n’aurait pas été envisageable avec l’utilisation d’outils fermés et propriétaires. En pratiquant cette posture de hacker, qui implique bidouillage et tâtonnement, il s’agit aussi de reconsidérer la place de l’erreur dans le processus de création. En effet, l’erreur fait partie intégrante de ce positionnement de par sa nature empirique. Rencontrer des erreurs permet finalement de tirer partis de l’imprévu et peut mener à des formes graphiques inattendues et convaincantes. Cet état d’esprit demande aussi d’envisager le code comme un outil de création. En effet, à l’inverse du logiciel qui prend une forme finie qui inévitablement limite et oriente son usage, le code est potentiellement illimité dans sa capacité de création."

Le terme hacker a pris son sens à l'arrivée de l'électronique, lorsqu'il fallait ouvrir et bidouiller des systèmes ou matériels. Notons que le terme hacker est souvent mal connoté, donc plus souvent on entendra l'appélation hacker éthique lorsque l'on "hack" sans motivation malveillante comme la sécurité informatique ou le piratage. Le hacker éthique détourne des outils ou des innovations techniques par le code ou de la programmation. HackBelgium, est un événement de Be.circular — Be.Brussels [68] qui en 2019 s'est consacré aux enjeux du réchauffement climatique et où le hacking prend place dans l'innovant, un moyen de transition vers le durable : "En rassemblant les connaissances, la technologie, l’inspiration et les ressources nécessaires, Hack Belgium apporte des solutions concrètes à la problématique du changement climatique. Tout ce que nous faisons en tant qu’êtres humains exerce d’une manière ou d’une autre un impact sur le climat. Cela fait du changement climatique un problème incroyablement complexe, pour lequel il n'existe pas de solution simple et uniforme. Et bien que le recyclage, l’éco-consommation, l'interdiction du plastique à usage unique, etc. soient un bon début, ces mesures ne font pas suffisamment la différence si l’on envisage la situation dans son ensemble. La problématique du climat doit être abordée d’une autre façon, en amont, en réinventant les industries et secteurs existants. Ce problème requiert des milliers de petites et de grandes solutions, chacune abordant le changement climatique de manière spécifique, dans le domaine qui lui est propre. Cela réclame créativité, technologie et esprit d’entreprise."

Le mouvement maker

La posture d'hacker c'est prendre en main l'utilisation des machines et des technologies. Faire par ses propres moyens et bidouiller relate aussi du mouvement maker. Isabelle Berrebi-Hoffmann [69] nous définit qui sont les makers : "c’est quelqu’un d’inventif qui fabrique lui-même des objets utiles à sa vie quotidienne, un informaticien qui bricole ses propres drones ou robots, ou encore un artiste qui détourne des objets… Autant de personnes qui adhèrent à la philosophie du faire soi-même et de l’autonomie d’accès aux objets de consommation, sans passer par le mass-market. Né aux États-Unis au début des années 2000, le mouvement maker est en fort développement depuis dix ans : c’est le résultat de la convergence entre la culture numérique du libre et de l’open source d’un côté et des savoir-faire artisanaux plus traditionnels de l’autre."

Do It Yourself (DIY)

Le DIY permet également de bidouiller et créér des nouvelles formes. Cette pratique tend également vers une économie des moyens par la récupération et demande un certain esprit de curiosité. De fait le DIY se lie à l'esprit hacker et le mouvement maker car tout deux demandent une curiosité et du manuel.

La récupération

Ces mouvements et postures qui bidouillent et manipulent, font souvent appel à la récupération de matériaux pour les transformer ou les réparer. La récupération ne coûte rien dans la chaîne de production et fait partie de l'économie circulaire. Les Récupérathèques [70] au sein des écoles sont très intéressantes, elles permettent des échanges et réemploi de matériaux. La Fédération des Récupérathèques [71] est un réseau qui regroupent plusieurs écoles en France, Belgique et Pays-Bas. Les avantages de ce modèle économiques sont : Réduire la production de déchets, Sensibiliser à l’impact environnemental de la création, Innover par le réemploi, Éviter l’encombrement des espaces, Créer du lien social et favoriser la transversalité pédagogique, Réaliser des économies, Offrir une matière première secondaire de proximité, Favoriser l’expérimentation sociale et économique et Ouvrir l’école sur l’extérieur. L'économie circulaire permet une proximité d'échanges et un circuit court qui limite les intermédiaires dans l'échange, l'achat ou la distribution. L'économie circulaire est souvent locale dû à son petit nombre d'intermédiaires et sa proximité. Grâce aux nombreuses récupérathèques, une économie local et circulaire n'est plus à fantasmer mais une réalité. La récupération entretient un réseau non polluant et à échelle humaine dû à sa coopération et collaboration.

Les outils Open-source

Les nouveaux savoir-faire et pratiques vu plus haut sont étroitement lié à l'Open Source. Dans son mémoire Vers la sobriété numérique, Anaël Le Gall nous dit : "La force de développer avec les langages basiques du web (CSS et HTML), réside dans leur forte adaptabilité. Les interfaces d’accès au web sont extrêmement nombreuses, contrairement à un livre qui ne se lit que via son format de création. Une solution web se doit d’être adaptable, vu la pluralité des interfaces, allant de la montre connectée, au smartphone, en passant par l’ordinateur. C’est le principe du design responsif, le fait qu’en modifiant le format de la page, les éléments la composant se réordonnent." [...] "l’open source. C’est une série de principes, s’appliquant via une licence, qui garantit l’ouverture du code source du logiciel. Cela permet de l’étudier, de le modifier et de le redistribuer. Même si il est très populaire pour le numérique, ce système peut s’appliquer à tout autres objets ou outils. Cette organisation de pensée a plusieurs avantages. Dans un premier temps, elle permet l’innovation avec la possibilité d’ajouter des améliorations créées par des contributeurs externes, amenant ainsi le développement d’une communauté autour du produit. Mais également du point de vue de la sécurité, le code source étant disponible aux yeux de tous, cela facilite la découverte de failles ou de bugs. Le mouvement open source essaie de redonner les outils et les connaissances pour permettre à chacun de créer des solutions adaptées à leurs questions." Le modèle d'Open-source invite à la maîtrise et souhaite redonner aux utilisateurs une autonomie et curiosité. Adopter le code c'est s'adapter, coopérer et bidouiller. Mais une idéale symbiose et interconnexion du code et du print dans cet esprit de bidouillage, récupération et low-tech, est-ce possible ?

[64]Apple/Adobe : une vieille histoire d'amour/haine
[65]Quentin Juhel et son mémoire : Outils et désirs d'émancipation
[66]Ernst Haeckel : Biologiste et philosophe du XIXème siècle.
[67]Etienne Ozeray et son mémoire : Pour un design graphique libre
[68] Be.circular — Be.Brussels et l’évènement HackBelgium
[69] Isabelle Berrebi-Hoffmann
[70] Récupérathèques
[71] Anaël Le Gall : Vers la sobriété numérique

Une technologie n'est jamais entièrement remplacée. Jean-Noël Lafargue dans le chapitre "Trous de mémoire, témoignage" du livre : Techniques & design graphique : Outils, médias, savoirs (page 35) [72] : "on n'arrête pas le progrès, parait-il. À ceux qu'une telle inéluctable marche du temps effraie, il est de coutume de rappeler qu'une nouveauté n'en remplace jamais vraiment une autre, que les technologies, notamment, s’accumulent : la télévision n'a pas fait disparaître la radio, la machine à écrire n'a pas fait disparaître le crayon, le train n'a pas laissé sa place à l'avion et le livre numérique ne remplacera pas le livre tangible sans piles. Et la bicyclette n'a jamais fait disparaître l'automobile (car oui, l'invention du véhicule motorisé à quatre roues est antérieure à celle des véhicules non motorisés à deux roues!)". Les technologies et le progrès innovent mais sans pour autant remplacer celles qui les précèdent. Le livre imprimé à l'ère du numérique est souvent le sujet de grand débat. Nous avons vu que : lire, publier et diffuser avaient des coûts écologiques importants, tant sur le papier qu'à l'écran et que l'un ne remplacerait pas l'autre ni dans son impact écologique. Donc comment faire co-exister ces deux supports pour en tirer leurs bénéfices respectifs ?

Le papier ne sera définitivement pas remplacé par le numérique. Mais comment diffuser aujourd'hui et quand faut-il renoncer au papier quand c'est bénéfique de passer au numérique ? Le livre : POST-DIGITAL PRINT - LA MUTATION DE L’EDITION DEPUIS 1894 par Alessandro Ludovico (2016 - Éditions B42) [73], explore les problématiques actuelles autour du papier et de l'édition depuis l'avènement du numérique comme moyen de diffuser. Cette rencontre dans le temps va transformer : l'édition de presse, de livres et de revues avec le numérique. Ils vont s'y rencontrer et muter mais "Comment l’analogique et le numérique vont-ils coexister dans l’ère post-numérique ? Comment vont-ils s’interpénétrer et se dépasser ? Quelles formes et quels comportements nouveaux vont découler de cette mutation ? ". Cette co-existence de supports de diffusion permet d'étonnantes interactions et "montre que la question de la place de l’édition et du numérique se pose dans un large ensemble de champs dont la typographie, l’imprimerie, le design graphique, le développement web, le webdesign et le marketing."

En fait, la survie et la surconsonsommation du papier sont dues à son succès. " Le papier était, si ce n'est mort, au moins à l'agonie. Pourtant, malgré ces funestes augures, force est de constater que c'est plutôt le mix des deux univers, digital et papier qui est désormais une réalité quotidienne, unissant en paix le «meilleur des deux mondes». Ainsi, dans ce nouveau paradigme de la communication, le papier est bien vivant et voici, de mon point de vue, les trois principaux arguments constitutifs de sa résilience. " écrit Bernard Plé dans Pourquoi le papier est-il résilient (2013) [74]. Il nous donne trois raisons d'existence au papier : Le papier est un média choisi, le papier est un média puissant et le papier est un média responsable. Et explique que de le consulter est un acte volontaire et manifeste, une appréciation plus forte, aussi : "99 % des Français possèdent une boîte aux lettres, 90 % la consultent tous les jours (Source: Balmétrie), s'il subsiste une fracture digitale, il n'est point de fracture de la boîte aux lettres."

Le métier de designer graphique évolue au gré des technologies et la survie du média papier est liée à sa constante réinvention et enjeux de son époque. Mais comment le livre va-t-il muter avec les pratiques numériques ?

Julie Blanc nous explique dans "Timeline des technologies de l’édition numérique" [75] que depuis les années 2000, l'objet livre tel qu'on le connait ainsi que ses usages se sont industrialisés et mondialisés. Sa fabrication s'est retrouvée délocalisée, remplacée puis alliée à du numérique. Voici son évolution : « Depuis les premières normes informatiques de codage de caractères (ASCII, 1963) jusqu’aux récentes inscriptions de formats de documents (PDF 2008, EPUB 3 2014, OpenDocument 2016) à l’ISO, les rapports du texte au numérique sont indissociables d’une histoire technique. Sans aborder les modèles conceptuels qui ont précédé ou accompagné ces inventions, cette frise chronologique non exhaustive entend recouvrir l’ensemble des supports, plateformes, logiciels, outils, formats, législations, standards et normes appliqués à la conception, la production et la diffusion d’éditions numériques. Il apparaît que des mondes longtemps pensés comme étrangers l’un à l’autre, à savoir : l’imprimé (paradigme de la mise en page fixe et résultant d’un processus séquentiel) et l’écran (modèle du web itératif sans cesse actualisé et interprété en fonction du contexte de lecture), se rejoignent. La jonction opère au moment où des technologies du web sont adaptées à l’imprimé ainsi que ce document graphique l’illustre : cette frise chronologique a été réalisée en HTML et CSS. »

Un nouvel écosystème de diffusion voit alors le jour, des outils software permettent à présent d’allier l'édition papier et numérique. Les designers développent de nouvelles connexions avec l’environnement et différents supports pour minimiser les coûts écologiques : ils redéfinissent le format livre pour que l'imprimé continue son évolution. Notons la pratique très hybrides "HTML2PRINT", où du code html est à destination du print. Il est possible d'allier le numérique low-tech et le papier récupéré pour des productions plus durables et renouvelables. Nous allons découvrir plusieurs solutions écologiques pour un minimum de perte de papier, chargements '' inutiles'' et fortement consommateur sur le web pour qu'ils ne participent plus au réchauffement climatique.

[72] Jean-Noël Lafargue dans le chapitre "Trous de mémoire, témoignage" du livre : Techniques & design graphique : Outils, médias, savoirs
[73] Le livre : POST-DIGITAL PRINT - LA MUTATION DE L’EDITION DEPUIS 1894 par Alessandro Ludovico (2016 - Éditions B42)
[74] Bernard Plé dans Pourquoi le papier est-il résilient (2013)
[75] Julie Blanc nous explique dans "Timeline des technologies de l’édition numérique"

Pour s'assurer d'une production dans de bonnes conditions et dans le respect des conditions de travail ne faut-il créér avec des matériaux locaux et en local sur sa machine ? Un design économiquement intéressant et durable est possible avec des matériaux recyclables ou prêts au réemploi. Le papier reste une ressource indispensable dans les pratiques éditoriales cependant son épuisement et l'augmentation des coûts nous forcent à l'assimiler autrement. Dans le numérique nous rencontrons déjà plusieurs alternatives à l'extractivisme et le réchauffement climatique tels les mouvements de lowtech et le libre contre l'obsolescence et la surconsommation. Ensuite dans le monde du papier nous avons vu qu'une consommation responsable par ses formats et provenance pouvait faire la différence.

Mais tendre vers une sobriété du design est-ce forcément changer d'outils ? Changer de pratique rime-t-il avec changer d'outils ? Mon exploration regroupe un ensemble de recherches par les designers et pour le design afin d'agrandir le champ de vision et l'application de celui-ci. S'inspirer de créatifs comme : OSP, Luuse, Médor, Édition B42, etc qui repensent nos savoirs-faire, l'économie et la société à travers l’éditorial numérique et le papier. Et finalement, être pluridisciplinaires dans nos pratiques et processus de création pour anticiper les étapes, où dans une certaine chaîne de production le gaspillage pourrait être évité.

En fait, pour une pratique du design responsable et écologique il faudrait transiter vers d’autres consommations voire récupérations, être conscient des conditions d'utilisation et de la provenance des outils pour une pratique libre.

Des designers qui innovent

Présentation des designers qui inventent de nouvelles formes de publication et qui luttent pour la sauvegarde des ressources naturelles. Ils réconcilient et remanient le papier et le numériques avec les enjeux climatiques et économiques.

Odd Paper

"En presque 3 ans Oddpaper a sauvé 24Tonnes de papier !" Odd Paper est mené par une jeune entrepreneuse, elle prône la récupération des chutes rognées en imprimerie. L'alternative qu'offre Odd Paper est un usage complet du papier neuf. Elle crée des carnets avec des chutes de papier d'imprimerie mais récupère aussi auprès de clients des anciens classeurs, intercalaires et affiches pour les réinventer sous une nouvelle forme qui est majoritairement le carnet ou l'agenda.

Odd Paper créé aussi des petits objets pour des clients avec des techniques de plis ou recoupe pour revaloriser d'anciens formats qui n'ont finalement pas été utilisé ou affiché. Exemple avec les affiches du KunstenFestivaldesArts 2022, confection de carnets pour des affiches non-usagées pour les Bozar.

Redo Papers

Une récupération de déchets grands formats (bâches, affiches, ...) pour les adapter en couvertures et des collaborations avec des imprimeur·euse·s pour rentabiliser les marges d'impression d'autres clients et imprimer le contenu des couvertures. Redopapers a été fondée par Tille et Linde, deux graphistes. Elles partagent une passion pour le papier, le design minimaliste et l'entrepreneuriat durable. Les déchets sont imprévisibles et c'est pour cela que personne ne possédera jamais les mêmes articles en papier. Elle renverse le modèle de production commun en cherchant d'abord les flux de déchets disponibles, puis à concevoir le produit. Elles produisent des planificateurs, des listes de tâches ainsi que des carnets de notes et de croquis.

Surfaces utiles

Des impressions de spécimens typographiques dans les marges et fonds perdus en collaboration avec les imprimeur·euse·s.

OSP - "open source publishing"

Open Source Publishing est une asbl belge qui interroge l'influence et l'accessibilité des outils numériques à travers sa pratique de la conception graphique alternative et non-standard. Ils préfèrent utiliser exclusivement des logiciels libres et open source.

(Visuel du site OSP)
Lowtech magazine

Ce site est alimenté par l'énergie solaire. Il a été designé de sorte à réduire radicalement la consommation d'énergie afin de diffuser et donner un accès durable à son contenu. Ie site partage également des technologies pour rendre soutenable notre société. L'utilisation de typo par défaut, d'images tramées et la possibilités de consulter le site hors-ligne minimisent un maximum les chargements.

(Visuel du site LowTechMagazine)
Médor

Est un média libre, inclusif, participatif et belge qui propose un journal trimestriel papier mais également en ligne. Le journal Médor est "Un laboratoire de pratiques innovantes. Quitte à repenser le fonctionnement d’un média, nous nous sommes lâchés : graphisme entièrement réalisé avec des logiciels libres, majorité des textes et illustrations libres de droits, rédaction en chef tournante, enquêtes participatives… Et bien plus encore." Médor offre un média accessible car aujourd'hui, le journalisme indépendant a un coût : "Selon l’article 27 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, toute personne a le droit de prendre part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent. Dès la création de notre projet éditorial, nous avons porté notre attention sur l’impact écologique et social de Médor au sein de la société belge. Nous souhaitons absolument éviter que le prix devienne un obstacle à l’accessibilité de l’information. Médor est un projet d’économie sociale, il en porte les valeurs et les met en pratique au quotidien."

(Visuel du site Médor) (Visuel Magazines Médor)
Luuse

"Luuse asbl vise à développer des méthodes d'éditions de forme et de publication alternatives. Elle s'attache à défendre une approche réfléchie, curieuse et consciente des relations entre outils de production, designer et utilisateur·ice·s." Luuse développe des outils pour produire des flyers, affiches, catalogues et sites à l'aide de technologies web, html et css à Bruxelles.

(Visuel du site Luuse)
PrePostPrint

PrePostPrint est un collectif qui explore les techniques et outils non conventionnels de production d'éditions. Leur nom incluant les termes " Pre " et " Post " qui précèdent le mot "Print" (impression) met en avant la filière de l'édition et la coopération des créateurs avec leurs lecteurs. Autour de la culture libre et ses principes (partage des connaissances et des outils, documentation de la production, mise en commun), PrePostPrint et ses designers prônent l'expérimentation et la documentation de méthodes et de formats singuliers dans le monde éditorial. Iels partagent et documentent leurs expérimentations et font appel aux pratiques collectives.

Hackers&Designers

Hackers&Designers basé à Amsterdam, organisent des ateliers à but non lucratif, iels mêlent la technologie, le design et l'art. En créant des moments partagés d'apprentissage afin de stimuler : l'échange et la collaboration au sein de ce vaste réseau de développeurs de logiciels et de matériel, de concepteurs, d'artistes et de chercheurs. Ensemble, ce construit des logiciels et/ou matériels, mais aussi des outils pédagogiques qui permettent un engagement critique avec et à travers la technologie.

(Visuel du site Hackers&Designers)
Jeudi Matin

Jeudi matin est un collectif bruxellois qui créé des espaces numériques sobres. Iels privilégient le responsable, une empreinte environnementale réduite et un web accessible et inclusif.

(Visuel du site Jeudi Matin)
Collectif bam devenu > Praticable

"Nous sommes un studio de design qui favorise l’autonomie. Nous concevons des interfaces, des espaces et des objets praticables permettant de faire soi-même. Des pratiques ouvertes, car nous travaillons tout type de formes : objets, espaces, interfaces… La spécialisation réduirait notre marge de manœuvre. Pour encapaciter largement, nous aimons ouvrir le projet à toute personne peu ou prou concernée. Nous dessinons des structures ouvrables, (dés)activables, (dé)réglables, (dé)composables, (dé)ménageables… des objets ouverts à une variété de pratiques. Nous documentons nos projets en open-source, proposons les plans en libre accès afin que chacun puisse en apprendre, s’en inspirer, les faire soi-même. Dans la même idée, notre pratique est située. Plutôt que d’apporter une solution à une situation, il s’agit pour nous de lui donner les moyens de se régler elle-même. Nous travaillons donc avec ce qui constitue chaque situation : les énergies, les savoirs, les savoir-faire, les matériaux disponibles sur place."

(Visuel du site Praticable)
B42 et leurs revues Backoffice

Les Éditions B42 interrogent l’environnement visuel dans lequel nous vivons, iels constituent une bibliothèque d’outils de réflexion sur les pratiques du design, du design graphique, de la typographie et de la création contemporaine. Ces publications croisent la technologie, les médias, le numérique, l’anthropologie ou les études culturelles. Les revues Back Office sont entièrement bilingue et regroupent l'ensemble des créations graphiques et activités digitales annuelles. Iels explorent les différents médias contemporains et pratiques numériques. Des questions sur les outils et machines dans le contexte du design et les mutations sur écran. "La multiplication des écrans et l'avènement d'internet ont ouvert la voie à des formes d'expression relevant d'une « graphosphère » élargie, vraisemblablement encore dominée par les normes et les figures du papier (lignes, feuille, page, paragraphes, marges, etc.). La tâche du designer serait-elle d'accompagner, le plus harmonieusement possible, ce passage d'une époque technique à l'autre ... (BackOffice revue n°3)

Une forme de spirale infernale éprouvée. La matière première s'épuise dû à son extractivisme croissant, elle se raréfie, devient plus chère et donc non accessible. Une surconsommation et surexploitation qui finalement nous privent par son prix croissant. Comment sortir du système onéreux du design et de la rareté des matériaux pour adopter une posture de maker ? Certains modes de travail sont à éviter pour sortir de ce carcan, tel que l'utilisation : de certains matériaux non-renouvelable ou services délocalisés, des logiciels propriétaires qui ne sont pas ouverts aux bidouillages, ... Une émancipation de certaines pratiques graphiques et sensibilisation face aux enjeux des crises actuelles. La découverte de pratique éditoriale autour du low-tech, le DIY, la récupération et l'entraide. Les maîtres-mots de cette posture pourrait être : s'émanciper, essayer, partager et économiser ? Un nouveau geste plastique : une émancipation des habitudes graphiques et une hybridation des formats dans la création. Utiliser plein de ressources différentes et voir comment elles s’entremêlent est plus intéressant. Prôner le collectif, partager nos savoirs c'est ça la clef d'une transition qui répond aux enjeux des crises écologiques et économiques !
Car en fait l'ouverture d'esprit sur les nouveaux outils éditoriaux va de paire avec l'esprit du libre. Faire-avec des nouvelles contraintes dans la production éditoriale, sans questions morales, éthiques et financières. Se contraindre à des limites graphiques pour découvrir de nouveaux horizons et finalement s'en libérer.

A

ADEB :
L’Association des Éditeurs Belges (ADEB) a pour vocation la représentation, l’information et l’animation de tous ces professionnels, en Belgique comme à l’étranger. C'est une asbl qui regroupe les éditeurs, distributeurs et diffuseurs professionnels d’ouvrages, sur tous supports (papier et numérique), de langue française.

ADOBE (Creative Cloud) :
C'est une entreprise informatique éditant des logiciels graphiques dont InDesign, Acrobat, Photoshop, Illustrator, etc. pour des outils de créations et marketing.

Alternatives :
Des changements, autres choix ou options.

Amazon :
Une entreprise de commerce en ligne qui fait partie des géants du Web : Les GAFAMs.

Apple :
Une entreprise multinationale américaine qui crée et commercialise des produits électroniques (Cette entreprise fait aussi partie des géants du Web : Les GAFAMs).

C

Cellulose :
La fibre tirée du bois pour fabriquer le papier.

Chutes de papier :
Ce sont les parties du papier rognées après l'impression.

D

Décarboner :
Réduire les émissions de CO2 (dioxyde de carbone).

Déforestation :
Perte, dégradation ou destruction de surfaces forestières dû à l'activité humaine et naturelle.

Délocalisé/Délocalisation : Lieu d'implatation et production d'une activité.

Design durable/Eco-design/eco-responsable :
Un design qui durera plus longtemps et qui aura un effet ou une manipulation qui est plus que " one use ". Un design durable s'inscrit plus facilement dans la nature, que ce soit dans sa production ou sa suppression. Sa conception demande à être conçu à partir de matériaux renouvelables, biodégradables ou recyclés. Ce design est conçu en respectant les principes de développement durable à des fins de protection de l’environnement. L'éco-design réfléchit toutes les étapes de production et distribution.

Design éthique :
Le design éthique responsabilise le designer envers l'humain et la société moderne. Un design au cœur des innovations technologiques pour réduire l'impact de nos productions sur le réchauffement climatique.

Diffusion :
Publier et distribuer un produit dans un certain réseaux de vente ou non.

Durable/durabilité :
Qui durera longtemps. Une stabilité et résistance dans le temps.

E

Écologie :
"Étude des milieux où vivent les êtres vivants, ainsi que des rapports de ces êtres avec le milieu." (dictionnaire le Robert)

Écologie Sociale :
" Murray Bookchin, est un philosophe, militant et essayiste écologiste libertaire américain. Il est considéré aux États-Unis comme l'un des penseurs marquants de la Nouvelle gauche (New Left). Il est le fondateur de l'écologie sociale, école de pensée qui propose une nouvelle vision politique et philosophique du rapport entre l’être humain et son environnement. "(Wikipedia)

Économie circulaire :
" L’économie circulaire est un système économique et industriel visant à maintenir les produits, leurs composants et les matériaux en circulation le plus longtemps possible à l’intérieur du système, tout en veillant à garantir la qualité de leur utilisation. L’économie circulaire s’oppose en cela à l’économie linéaire qui se débarrasse des produits et matériaux en fin de vie économique. "(Belgium.be — Informations et services officiels)

Économie des moyens :
Une économie qui conserve les matériaux necéssaire à la production graphique. Cette économie se fait par la récupération et revalorisation du pré-existant.

Éditorial/'editing' :
Rédaction de contenu et média qui vont être diffusé.

Éphémère :
Qui a une courte durée de vie.

Ethique :
Un concept qui est proche de celui de la morale.

Extractivisme :
C'est une exploitation massive de la nature à des fins industrielles.

F

Feuilles de passe :
Feuilles qui permettent les réglages de l'imprimante pour les couleurs, quantité de jet d'encre, calages, etc.

Format :
Les formats sont multiples dans l'édition et le numérique. On peut parler de format de fichier numérique ou de format de page web (responsive) comme de format voire dimensions dans le 'print'.

G

GAFAMS :
Les géants du Web : Google, Apple, Facebook (Meta), Amazon et Microsoft — qui sont les cinq grandes firmes américaines.

H

Hacker :
Un hacker prend en mains l'utilisation de machines et technologies, iels se les réapproprient en les bidouillant.

Hardware :
Les éléments matériels qui composent une machine.

Hébergement (web) :
L'hébergement permet le stockage de données, informations, sites. Il peut être local sur un serveur ou sa machine ou sur le web et donc sur un serveur en ligne.

I

Inflation :
Une hausse global des prix et revalorisation de la monnaie.

L

Libre/mouvement libre/culture libre :
Est un mouvement et culture qui promeut la liberté d'accéder, distribuer, copier, modifier.

Lignine :
La lignine est un composant du bois. C'est une fibre séparée de la fibre cellulose pour éviter qu'un papier ne jaunisse trop vite.

Lowtech :
Est une solution simple et peu coûteuse de produire sans trop d'impact sur le réchauffement climatique dû aux chargements du web d'éléments lourds.

Low-design :
Un design léger qui entre dans l'utilisation de matériaux durable.

M

Maker :
"c’est quelqu’un d’inventif qui fabrique lui-même des objets utiles à sa vie quotidienne, un informaticien qui bricole ses propres drones ou robots, ou encore un artiste qui détourne des objets…"Isabelle Berrebi-Hoffmann

Mercantile:
Avide de profit, marchandisation.

Monoculture :
Culture d'un seul produit, une seule espèce.

O

Obsolescence/obselète :
Un terme signifiant ce qui va périmer, aujourd'hui on allie souvent les produits numériques au terme : "obsolescence programmée", une fin définie au matériel.

Outils :
Objets ou moyens qui permet de fabriquer, faire un travail.

P

Pérènnisation :
Qui rend durable, éternel.

Pilon :
"Dans le domaine de l’édition et de la presse, le pilon désigne à la fois les exemplaires des livres ou des publications sur papier destinés à être détruits, et la « machine » théorique destinée à cet effet." (Wikipédia)

Pollution numérique :
Une pollution dû aux appareils numériques qui consomment une énergie nécessairement électrique.

R

Réchauffement climatique :
Augmentation global des températures liés aux activités humaines : une modification et déséquilibre météorologique.

Recyclage :
Traitement de produits et matières pour qu'ils deviennent renouvelables, peuvent être transformé.

Renouvelable :
Des sources qui entrent dans un cycle durable dû à leur renouvellement, elles ne s'épuisent pas.

Résilience :
Capacité à résister aux chocs, à être durable.

Responsable :
Qui répare les dommages causés, répondre de ses actes.

Ressources/Ressources naturelles :
Des moyens, substances qui quand elles sont naturelles : sont tirés d'un environnement naturel sous forme primaire avant leur transformation par l’activité humaine.

S

Savoir-faire :
Des moyens, techniques ou compétences pour résoudre des problèmes pratiques.

Serveurs :
Est un ordinateur qui stock et traite le contenu des sites web.

Sobriété numérique :
Une forme numérique qui réduit son impact environnemental. Le Low-Tech : les "basses technologies" en font partie.

Software :
Des logiciels par une machine (hardware).

Surconsommation :
Consommation excessive et anormale qui participe à la surexploitation.

Surexploitation :
"La surexploitation, en sciences de l'environnement et dans l'économie du développement durable, est le stade où un prélèvement de ressources naturelles, difficilement ou coûteusement renouvelables, dépasse le stade du renouvellement"(Wikipédia)

Surproduction :
Production anormale souvent liée à la surconsommation et surexploitation.

[1] Kurt Bills- Scarcity
[2] Wikipédia - Lowtech
[3] Low-tech : Assurer durablement l'essentiel pour tous (Avril 2022)
[4] Low-tech-nation
[5] Bruxelles environnement
[6] RDC Environment
[7] EcoConso (Avril 2022)
[8] Planetoscope
[9] l’ADEME
[10] Le papier : premier déchet du bureau - Agir pour la transition
[11] WWF - Papier et Pâte à papier
[12] Forest Stewardship Council (FSC)
[13] D’après Copacel dans l'article Ecoconso
[14] Odd Paper, : une jeune entreprise Bruxelloise qui prône la récupération de papier et confectionne des carnets.
[15] WWF - Papier et pâte à papier
[16] EcoConso
[17] D'après Le papier : premier déchet du bureau par Agir pour la transition
[18] ConsoGlobe - Ces 6 déchets non recyclables à ne pas mettre dans la poubelle de tri
[19] Bâche-publicitaire.com - "Les différentes étapes de recyclage des banderoles"
[20] Redo Papers
[21] Ecoconso
[22] Bookletprint
[23] RisoFrance, La technologie riso, une eco-gamme
[24] Nous explique LimePack : "tout ce qu'il faut savoir sur l'impression digitale"
[25] J'imprime en France
[26] Citeo — Comprendre les logos et labels environnementaux pour les papiers
[27] Ecoconso
[28] Surfaces Utiles : "Surfaces Utiles partage des pratiques artistiques et typographiques amatrices-professionnelles. Chaque nouvelle publication est aussi pour la maison d’édition l’occasion de chercher des modèles économiques alternatifs à l’industrie de l’édition, en complicité avec ses acteurs, et notamment par l’appropriation et le détournement des processus d’impressions standardisés. Surfaces Utiles édite notamment La Perruque, une revue de typographie de 1 × 90 cm de long imprimée en douce, dans les marges de tirages offset."
[29] Le papier : premier déchet du bureau — Agir pour la transition
[30] Syndicat national de l'édition (SNE)
[31] Bubblebd : "En moyenne 26 300 tonnes de livres partent au pilon chaque année en France" rédigé par Thomas Mourier en 2021
[32] Commission Environnement et Fabrication du SNE (Syndicat national de l’édition)
[33] "On achève bien des livres " un film de Bruno Deniel-Laurent et produit par Hélène Badinter en 2012 (Titre anglais : Fiction Pulp).
[34] Livres - Impressions de Chine par Le Devoir
[35] Quel est le secret du succès d’Amazon ? — Channel Vision Magazine
[36] Un Manifeste : Le livre est-il écologique - Matière, artisans, fictions par Les Éditions Wildproject
[37] Monocultures de l’esprit écrit par Vandana Shiva, Les Éditions Wildproject : "Que se passe-t-il lorsque seuls certains types de plantes et de personnes sont valorisés ? Dans Monocultures de l’esprit, la penseuse indienne Vandana Shiva s’attaque à ce qui pourrait être le problème central du « développement » : en maximisant certains types de production, nous éliminons systématiquement tous les autres types de vie, humaine et non humaine. L’autrice analyse de façon méthodique comment une certaine vision de la science portée par l’Occident a conduit à un système de monoculture dans l’agriculture et la foresterie – un modèle qui est en train d’être imposé à tous les pays des Suds, où il supplante des systèmes ancestraux véritablement durables de ces sociétés, et plonge des millions de personnes dans la pauvreté. Pour lutter contre ces monocultures de l’esprit, Shiva appelle à une démocratisation des savoirs légitimant la diversité, et à une « insurrection des connaissances subjuguées ». Cinq essais militants et accessibles sur les véritables implications de la monoculture, par une des plus grandes altermondialistes du Sud global."
[38] Energy Innovation : Quelle Quantité D'énergie Les Centres De Données Utilisent-Ils Vraiment ? (2020)
[39] Masanet et al. dans Energy Innovation : Quelle Quantité D'énergie Les Centres De Données Utilisent-Ils Vraiment ? (2020)
[40] "Le monde informatique : Face aux pics de chaleur, les datacenters français en surchauffe ?"
[41] Le mémoire : Vers la sobriété numérique - Anaël Le Gall (ESAC Cambrai, 2023)
[42] Les Pepites Vertes : une communauté pour la transition écologique et orientation aux enjeux environnementaux.
[43] Low-tech Magazine par Kris de Decker
[44] Guillaume Slizewicz : un jeune graphiste français basé à St-Gilles.
[45] Collectif Bam (devenu "Praticable") : est une coopérative qui favorise l'autonomie par le numérique.
[46] Presses du Réel : une maison d'édition indépendante et une société de diffusion et de distribution basée à Dijon.
[47] Victor Papanek : Design pour un monde réél : écologie humaine et changement social
[48] Le Monde - " Le message c'est le médium "
[49] Wikipedia - L'obsolescence
[50] D’après un document publié en 2000 par la Fondation pour l’enfance - Paris
[51] Fondation Ellen McArthur : "est une association caritative britannique qui vise à inspirer une génération à repenser, re-conceptualiser et construire un avenir positif à travers le cadre d'une économie circulaire" - Wikipedia
[52] The Shift Project — ÉNERGIE ET INFLATION : DES LIAISONS DANGEREUSES
[53] Les ressources minières, le pétrole, et après ? - Transition énergétique : vers l’utilisation des énergies renouvelables de Donatien Njomo [54] RTBF - "Les prix du papier en forte augmentation depuis janvier, une charge supplémentaire pour les écoles"
[55] Les éditions du commun à Rennes.
[56] Timothée Parrique, chercheur en économie écologique en Suède.
[57]Belgium.be — Informations et services officiels
[58]Les Récupérathèques
[59]Les Petits Riens
[60]La smart
[61]Pêle-mêle : un lieu de "recyclage culturel" et "d'occasions".
[62]QUARTIER LIBRE : "Un Écosystème éditorial, connecté, interactif et trans-média."
[63]Open Design - FABRICATION NUMÉRIQUE ET MOUVEMENT MAKER
[64]Apple/Adobe : une vieille histoire d'amour/haine
[65]Quentin Juhel et son mémoire : Outils et désirs d'émancipation
[66]Ernst Haeckel : Biologiste et philosophe du XIXème siècle.
[67]Etienne Ozeray [61] et son mémoire : Pour un design graphique libre
[68] Be.circular — Be.Brussels et l’évènement HackBelgium
[69] Isabelle Berrebi-Hoffmann
[70] Récupérathèques
[71] Anaël Le Gall : Vers la sobriété numérique [72] Jean-Noël Lafargue dans le chapitre "Trous de mémoire, témoignage" du livre : Techniques & design graphique : Outils, médias, savoirs
[73] Le livre : POST-DIGITAL PRINT - LA MUTATION DE L’EDITION DEPUIS 1894 par Alessandro Ludovico (2016 - Éditions B42)
[74] Bernard Plé dans Pourquoi le papier est-il résilient (2013)
[75] Julie Blanc nous explique dans "Timeline des technologies de l’édition numérique"

Alexia de Visscher (Promotrice de mémoire)
Nastasia Anzad (Oddpaper : lieu de stage et inspiration pour mon mémoire)
Mes camarades, professeur·e·s et l'erg
Mes proches...